Plus rien que les vagues et le vent, Christine Montalbetti
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Publié le 15 août 2017

Dans Plus rien que les vagues et le vent, Christine Montalbetti nous emmène à Canon Beach, une minuscule bourgade américaine subissant sans fin les assauts de l’océan déchainé. C’est la morte saison, les motels sont presque vides, les bars aussi, la ville aussi. Restent Colter, Shannon et Harry Dean, avec lesquels notre narrateur finit par se lier d’amitié, dans une certaine mesure, découvrant petit à petit leurs passés.
Alliant des descriptions riches à un style fluide, Christine Montalbetti signe un roman agréable, avec cependant quelques longueurs et digressions (un chapitre entier sur la cheminée de la chambre du motel) qui rendent parfois la lecture un peu ennuyeuse. Les personnages évoqués (habitants de Canon Beach et habitués du bar le Retour d’Ulysse) sont dans l’ensemble franchement banals. Mais leurs histoires respectives ne le sont pas forcément, et donnent à l’auteur l’occasion de philosopher un peu sur la vie, et les leçons qu’elle nous apprend, sur les gens et leurs travers, sur la liberté et ce qu’il faut sacrifier pour l’obtenir.
Le narrateur entretient un espèce de suspense quand à ce qu’il lui est véritablement arrivé à Canon Beach (et d’ailleurs, y est-il encore?) tout au long de son récit. Il prend largement le temps de planter le décor, nous détaillant à loisir les acteurs principaux, mais pas seulement. On est aussi largement renseignés sur les autres, sur la météo, sur l’histoire du coin, sur les habitudes des uns et des autres, sur l’expédition de Lewis et Clark. On ne comprend pas toujours très bien le rapport avec notre intrigue, mais finalement, avec le recul, je me dis qu’il n’y avait pas nécessairement. A mon avis, Montalbetti cherchait plus à créer une atmosphère qu’à vraiment faire avancer l’intrigue, qu’à attiser la curiosité du lecteur. Et elle y réussit plutôt bien dans le sens où on se sent vraiment à Canon Beach, on imagine, on sent, on voit, on entend, le ressac des vagues et les conversations des hommes alcoolisés.
Il faut dire quand même, qu’arrivée à la fin, j’ai été déçue, je m’attendais à un évènement un peu moins prévisible, je ne sais pas, plus spectaculaire. Mais finalement non, c’est juste ça, ce fameux incident dont on entend parler depuis le début à mots couverts. Et ça finit franchement un peu en queue de poisson, on ne sait pas trop ce qu’il va advenir de notre narrateur. Mais à vrai dire, on s’en fiche un peu au final. Il a fait son bout de chemin, il nous a dévoilé Canon Beach, il nous a fait entrer dans ce monde là. Et il s’en est fait exclure. Donc il ne nous sert plus vraiment à quoi que ce soit, il ne peut plus rien nous apprendre. C’est donc une bonne fin quand on y pense.
«Tout ça, je me dis parfois, c’est la faute de l’océan. C’était à force qu’ils l’entendent, Colter, Shannon et Harry Dean, à force du fracas des vagues, de la colère que c’est. Ces trois-là, je les avais rencontrés le jour de mon arrivée ici, à Cannon Beach, dans cette petite ville du bout de l’Amérique, et presque chaque soir on se retrouvait au bar de Moses. Je les écoutais me raconter leur vie, et ça me liait à eux, d’une certaine façon. Je croyais que ça me liait à eux. Je me le faisais croire. Parce qu’au fond de moi, peut-être bien que je savais ce qui allait arriver. Mais est-ce qu’on sait ?»
Les gars, en un sens, leur vie, je réfléchissais dans la nuit froide et je me suis dit ça un soir, pour résumer (je me le dis encore parfois, allongé sur ce fauteuil devant la baie vitrée), c’était plutôt comme s’ils la lisaient que comme s’ils l’écrivaient. Comme s’ils en découvraient les péripéties une à une, à mesure qu’elles se produisaient, sans pouvoir rien y faire. C’était comme des choses qu’on avaient décidées pour eux, des choses auxquelles des genres de forces obscures travaillaient. Et ils pouvaient essayer d’utiliser toute la petite marge de manœuvre qui leur restait, l’épisode suivant, ils se le prenaient chaque fois de plein fouet.
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