Mina Loy a été une femme exceptionnelle avec un destin hors du commun au travers d’époques et de continents particulièrement troubles. Ceci dit, je ne trouve pas que le livre de Mathieu Terence lui rende vraiment justice, et j’ai été jusqu’au bout pour en avoir le cœur net. Savant mélange entre une énumération de faits relatifs à sa vie et chronique rapide de la vie culturelle internationale de l’époque, ce livre n’est ni émouvant, ni informatif. Les plus grands évènements de la vie de Mina, comme la disparition d’Arthur Cravan en mer pour n’en citer qu’un seul, sont traités à la va-vite, en quelques phrases à peine. Or, dans l’exemple cité, il s’agit tout de même du grand amour de sa vie qui disparait à jamais ! Tout est traité rapidement, les voyages, les changements d’activité, les décès, les ruptures, les guerres. Tout finalement, sauf l’inévitable énumération sans fin d’intellectuels artistes de ce temps, dont certains ne nous sont certes pas inconnus (Marcel Duchamp, Joyce, Colette ou Ezra Pound par exemple) tandis que les autres ne nous évoquent absolument rien. Autant j’apprécie qu’un livre m’apprenne des choses, autant je préfère les apprendre directement dans ses pages et ne pas avoir à dégainer Wikipédia à chaque ligne.
En un mot, si j’ai apprécié de découvrir le personnage de Mina Loy, je n’ai pourtant pas accroché avec le style de l’auteur, assez pompeux, très rapide et plus centré sur les idées que sur le personnage en lui-même (et encore, à part son côté indubitablement féministe, je n’ai pas vraiment réussi à cerner les positions idéologiques du personnage). Un roman finalement assez décevant pour un synopsis plutôt prometteur au premier abord.
Parce que Mina Loy avait l’envergure d’une héroïne contemporaine, sa vie tient du roman autant que de la légende. Née dans l’Angleterre victorienne et morte dans l’Amérique des sixties, elle a traversé deux guerres, vécu sur trois continents et dans les plus grandes villes, de New York à Paris en passant par Mexico, frayé sans s’y inscrire avec toutes les écoles de la modernité, du futurisme au féminisme, connu les plus grands génies de son temps, Marcel Duchamp, Djuna Barnes, Joyce, Freud ou encore Picabia. Mariée jeune à un homme pour qui elle était tout mais qui s’appliqua à lui faire croire qu’elle n’était rien, amoureuse folle du poète et boxeur Arthur Cravan qu’elle suivra, en pleine Seconde Guerre mondiale, jusqu’au Mexique où il disparaitra en mer, elle aura quatre enfants dont deux mourront sans qu’elle les ait vraiment connus. Cosmopolite, intrépide, plus cérébrale que frivole et aussi seule que libre, elle fut poète, peintre, intellectuelle et essayiste, aventurière avant tout.
Si Mathieu Terence n’eut rien à inventer pour livrer le portrait de cette femme d’exception, il fallait son talent d’écrivain pour traduire au plus près sa fougue et sa modernité. D’une langue sensible et aiguisée, il déroule le parchemin de sa légende pour nous offrir, non une biographie, mais un récit subtil et haletant dans lequel on avance comme dans un présent sans cesse recommencé. Un destin chaque jour remis en jeu.
Les femmes ne doivent compter que sur elles-mêmes, et commencer par savoir ce qu’elles veulent vraiment. Elle prône un dépucelage systématique à la puberté pour ôter des mentalités la notion de pureté indexée à la virginité. Elle regrette qu’un homme soit estimé pour ses qualités et une femme pour la façon dont elle s’entend à manipuler un homme de qualité.
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