
Quand Abraham Trahaerne disparaît sur les routes américaines pour errer de bar en bar à la recherche de l’inspiration, son ex-femme, Catherine, fait appel à C.W. Sughrue, détective privé spécialisé dans les disparitions. Une petite course poursuite finit par les réunir dans un bar déglingué à Sonoma, surtout connu pour son bouledogue amateur de bière. Une bagarre fortuite conduit Traheane à l’hôpital, conduisant Sughrue à prendre un nouveau cas, celui de la fille disparue de Rosie, propriétaire du bar miteux. Disparue depuis 10 ans, Betty Sue a peu de chances d’être retrouvée… mais la fascination qu’elle exerce sur Sughrue convaincra celui-ci d’aller au bout de la piste, quitte à traîner derrière lui l’écrivain et le chien alcooliques.
Vous reprendrez bien un peu d’alcool, sexe, drogue et violence? Parce qu’il n’est globalement question que de cela dans ce récit coupant et impitoyable. Des femmes magnifiques et bestiales, des hommes brutaux et sans pitié, tous portés sur la bouteille et une histoire qui trempe dans le porno et le flower power – voilà un bon cocktail pour un roman incendiaire. Tout semble plus ou moins normal au début – si tant est qu’on laisse de côté le fait que le privé boit tout autant que l’écrivain en suivant sa piste. Et puis tout part en vrille vers le milieu du livre, les apparences sont mises à sac, les mauvaises intentions dévoilées, et le roadtrip reprend, un peu plus sanglant et dramatique qu’avant.
Le moins qu’on puisse dire c’est que ce roman est noir, bien noir. Les faux héros, complètement imbibés la plupart du temps, généralement grossiers avec les femmes, prêts à tout pour une bonne sauterie et violent aussi souvent que possible, ne côtoient que des personnages méprisables, matrones machiavéliques, barons de la drogue, menteurs invétérés. Finalement, on n’attache à Sughrue, avec son côté bad boy légèrement chevaleresque, son amitié déplacée et mal récompensée pour le vieux Trahaerne, qui lui a connu des jours meilleurs. On s’attache à Fireball aussi, personnage clé pour servir le cynisme et l’humour noir de l’auteur, dont on est rassasiés d’un bout à l’autre du roman.
C’est un roadtrip, un vrai, avec une succession de motels, de bars crasseux, de femmes faciles, et d’argent sale. Un vrai roadtrip où chacun des personnages se demande comment il a fini par atterrir là, revient sur son passé, sur la guerre, la prostitution, l’amour éconduit, le succès aussi. Ils sont tous des ratés, chacun à leur manière, et l’auteur nous demande d’en rire, de cette absurdité de la vie qui a réuni tous ces personnages perdus ensemble pour cette aventure improbable. Chacun dissimule sous sa carapace sa vraie nature, et trouve dans les autres une sorte de réconfort, déplacé mais touchant, le genre de sentiments auxquels seuls les gens qui n’ont plus rien à perdre peuvent s’abandonner.
Dévoré en six heures top chrono, Le dernier baiser est un livre qu’on ne laisse pas tomber, qui nous emporte et nous remue les tripes jusqu’au bout, par son intrigue tarabiscotée et ses personnages almabiqués.
Pour Sughrue, privé officiant à Meriwether dans le Montana, ce contrat avait tout d’une aubaine. Budget illimité pour écumer les bars des États-Unis à la recherche de Trahaerne, auteur à succès porté sur les fugues autant que sur la boisson. Sitôt l’écrivain débusqué dans un bar miteux de la côte Ouest, Sughrue se trouve chargé d’une nouvelle enquête : il doit retrouver la trace de Betty Sue Flowers, jeune fille énigmatique disparue dix ans auparavant. La compagnie de Trahaerne étant plutôt agréable, notre privé embarque l’alcoolique dans son périple. Mais il ne pouvait prévoir sa fascination grandissante pour la disparue ni les ramifications sans fin de cette affaire où tous semblent sans cesse se jouer de lui.
Le Dernier Baiser, roman emblématique du géant américain James Crumley, met en scène pour la première de ses aventures un détective inimitable qui balade son lecteur aux quatre coins de l’Ouest américain.
Ah, oui, s’amuser. Les fêtes qui durent éternellement, la bouteille de whiskey qui ne se vide jamais, les drogues récréatives. Les dames étranges drapées de denim et de satin, ornée d’argent et d’or martelé. Ah, oui, la vie facile, sans le joug de la famille ou les chaînes d’un travail régulier, sans la contrainte des responsabilités. La liberté n’est que le nom qu’on donne au fait de n’avoir rien à perdre, hein, et la nuit est à nous, il faut juste continuer à toujours continuer. S’amuser, c’est boire un cinquième verre dans une ville inconnue, ou laver sa gueule de bois avec une bonne douche chaude puis une bonne bière fraîche dans une chambre de motel. S’amuser, c’est le goût salé de la fatigue sur les seins d’une auto-stoppeuse hippie dans le bazar duveteux de son sac de couchage. C’est ça, c’est exactement ça. S’amuser c’est difficile, mais c’est tout ce que je sais faire.
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