Au Bonheur des Dames Emile Zola ReadingClassicsChallenge2018

#ReadingClassicsChallenge2018

Paris se transforme, le commerce traditionnel déclinant petit à petit face à l’essort irrémédiable des grands magasins. Un bras de fer acharné oppose le drapier Baudu à Octave Mouret, maître incontesté du Bonheur des Dames. C’est dans cette atmosphère électrique de Denise, nièce de Baudu, débarque à Paris pour y gagner de quoi vivre. C’est au Bonheur des Dames qu’elle trouve sa place, gagnant à force de travail et de patience encore plus que ce qu’elle n’était venue chercher…

Moi, je suis un passionné, je ne prends pas la vie tranquillement, c’est ce qui m’y intéresse peut-être. […] Vois-tu, c’est de vouloir et d’agir, c’est de créer enfin… Tu as une idée, tu te bats pour elle, tu l’enfonces à coups de marteau dans la tête des gens, tu la vois grandir et triompher… Ah ! oui, mon vieux, je m’amuse !

Décidément, Zola avait tout compris. Ce n’est qu’aujourd’hui que le modèle commercial capitaliste à l’excès qu’il décrit dans son livre commence à nous faire entrevoir ses limites. Ce fourmillement insaisissable et incessant, la loi de la multiplicité et de la bonne affaire, l’appétit intarissable des femmes pour leurs chiffons, toutes ces choses si vraies et si magnifiquement décrites par l’auteur dans ce récit plus vrai que nature ! Un livre véritablement époustouflant, par sa profusion de détails et la richesse de ses personnages, résultats d’une documentation précise. Plus qu’un roman, c’est un état des lieux incroyablement véridique de l’état du commerce en 1883, on pourrait croire que le Bonheur des Dames a véritablement existé, tant il est rendu réel sous nos yeux ébahis de lecteurs incultes du XXIème siècle.

Tous en convenaient le patron était le premier étalagiste de Paris, un étalagiste révolutionnaire à la vérité, qui avait fondé l’école du brutal et du colossal dans la science de l’étalage. Il voulait des écroulements, comme tombés au hasard des casiers éventrés, et il les voulait flambants des couleurs les plus ardentes, s’avivant l’un par l’autre. En sortant du magasin, disait-il, les clientes devaient avoir mal aux yeux.

Les mérites de ce roman ne sont plus à écrire, il est indéniable qu’Au Bonheur des Dames restera l’un des chefs d’oeuvre de la littérature française. Pourtant, j’ai eu quelques difficultés à accrocher au récit – surtout aux interminables parties de shopping de Mesdames de Boves, Marty et Desforges, personnages faibles se laissant emporter dans leurs folies dépensières. J’ai eu le malheur de regarder The Paradise, série soit-disant inspirée d’Au Bonheur des Dames, bien que très loin du véritable récit. J’attendais donc plusieurs  rebondissements qui ne se sont jamais produits dans le livre. J’aurais aimé plus d’action, plus encore de circonvolutions dans ce ballet entre Denise et Mouret, plus de drame encore dans l’effondrement continu du petit commerce. Je me suis parfois lassée des descriptions du Bonheur et de ses richesses, si éloquentes soient-elles. J’avais une telle hâte d’arriver au bout du récit, que j’ai été légèrement déçue par le dénouement, à la fois prévisible et inattendu.


Résumé de l’éditeur :

Octave Mouret affole les femmes de désir. Son grand magasin parisien, Au Bonheur des Dames, est un paradis pour les sens. Les tissus s’amoncellent, éblouissants, délicats. Tout ce qu’une femme peut acheter en 1883, Octave Mouret le vend, avec des techniques révolutionnaires. Le succès est immense. Mais ce bazar est une catastrophe pour le quartier, les petits commerces meurent, les spéculations immobilières se multiplient. Et le personnel connaît une vie d’enfer. Denise échoue de Valognes dans cette fournaise, démunie mais tenace.
Zola fait de la jeune fille et de son puissant patron amoureux d’elle le symbole du modernisme et des crises qu’il suscite. Personne ne pourra plus entrer dans un grand magasin sans ressentir ce que Zola raconte avec génie : les fourmillements de la vie.


À son tour, elle souffrait. N’était-ce point assez déjà d’avoir à se défendre contre lui ? aurait-elle encore à se défendre contre elle, contre les souffles de tendresse qui lui ôtaient par moments tout courage ? Quand il lui parlait ainsi, quand elle le voyait si ému, si bouleversé, elle ne savait plus pourquoi elle se refusait ; et elle ne retrouvait qu’ensuite, au fond même de sa nature de fille bien portante, la fierté et la raison qui la tenaient debout, dans son obstination de vierge. C’était par un instinct du bonheur qu’elle s’entêtait, pour satisfaire son besoin d’une vie tranquille, et non pour obéir à l’idée de la vertu. Elle serait tombée aux bras de cet homme, la chair prise, le cœur séduit, si elle n’avait éprouvé une révolte, presque une répulsion devant le don définitif de son être, jeté à l’inconnu du lendemain. L’amant lui faisait peur, cette peur folle qui blêmit la femme à l’approche du mâle.

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