
Cette année, j’ai participé aux 68 premières fois, une initiative formidable faisant voyager une sélection de premiers romans à chaque rentrée littéraire pour les faire découvrir à plus de 68 lecteurs répartis sur les territoires francophones. Pour ma première participation, la sélection était incroyablement diverse et variée, entre les romans autobiographiques, historiques ou fictifs, des villages entourés de neige du Canada aux bidonvilles de Buenos Aires, avec un petit détour par la prison de Fleury-Mérogis et la Russie en pleine révolution communiste. J’ai bien voyagé, j’ai bien vécu en compagnie de tous ces personnages plus ou moins réels, et voici mon bilan de cette merveilleuse expérience – que je renouvelle en Septembre !
Il n’y a qu’un seul roman que je n’ai pas pu finir, Eparse, aimé pourtant par beaucoup d’autres lecteurs. Certains autres ont suscité ma curiosité mais ne me laisseront pas un souvenir impérissable (Fugitive parce que reine, L’Attrape-souci par exemple). Je ne garderais ici que mes coups de coeur et mes jolies découvertes, premiers romans qui méritent d’être lus et partagés pour encourager leurs auteurs respectifs à renouveler l’aventure !
Coups de Coeur
- Les Déraisons, Odile d’Oultremont (L’Observatoire)
Avis : ⭐️⭐️⭐️⭐️⭐️
Un livre fantaisiste et fantasque pour décrire l’une des plus grandes difficultés de la vie : la souffrance d’un être cher, son combat perdu d’avance contre la maladie. Ici, pas de tragédie mais une ode à la vie, un encouragement à saisir chaque instant comme s’il c’était le dernier, un rappel de ce qui compte vraiment dans l’existence. Ce livre m’a prise aux tripes, m’a donné une belle leçon – je me souviendrais longtemps de cette lecture.
- Ta vie ou la mienne, Guillaume Para (Anne Carrière)
Avis : ⭐️⭐️⭐️⭐️
C’est l’histoire d’un homme, de la chance qui lui a été donnée d’échapper au déterminisme, une chance que le destin ne lui a finalement pas laissée, en l’envoyant dans l’enfer même auquel il pensait avoir échappé. Quand tout semble perdu, Guillaume Para nous montre qu’il y a encore de l’espoir, qu’il y a encore du positif dans la vie. Le récit d’une vie difficile, magnifiquement racontée, avec des mots qui vont droit au coeur.
- Apprendre à lire, Sébastien Ministru (Grasset)
Avis : ⭐️⭐️⭐️⭐️
On ne choisit pas ses parents, et eux n’ont parfois pas choisi non plus de ne pas aller à l’école. Ici, un narrateur individualiste et désabusé renoue avec son père analphabète en l’aidant à apprendre à lire : c’est à travers ce projet inhabituel que le fils et le père se trouvent, s’apprivoisent et commencent à s’apprécier. Un court roman plein de réflexions très justes sur la vie, sur la famille et la chance que nous avons de pouvoir lire.
- L’homme de Grand Soleil, Jacques Gaubil (Paul&Mike)
Avis : ⭐️⭐️⭐️⭐️
L’incroyable découverte de l’homme de Grand Soleil est sans conteste palpitante, mais ce n’est pas ce que je retiens de cette lecture. Je retiens l’humour de l’auteur, dissimulé derrière son narrateur acerbe, son évaluation sans pitié de notre monde d’aujourd’hui, sa grande culture générale, utilisée ici pour crédibiliser son personnage et donner de la consistance à son roman en mêlant intrigue et philosophie – une réussite.
Jolies découvertes
- Ariane, Myriam Leroy (Don Quichotte)
Avis : ⭐️⭐️⭐️⭐️
Une aspiration, voilà ce qu’est ce roman : il aspire son lecteur dès les premières pages, le fait tomber dans un tourbillon trouble où il n’a plus qu’une envie : tourner les pages. Plus qu’un simple roman, c’est un polar psychologique bien ficelé où les mots agressent et choquent, où les phrases bouleversent et retournent. L’histoire terrible d’Ariane est tellement criante de vérité qu’on reste longtemps à se demander si elle est vraie.
- Les Rêveurs, Isabelle Carré (Grasset)
Avis : ⭐️⭐️⭐️
C’est un récit sans logique, le récit d’une vie désordonnée, celui d’une femme qui s’est construite toute seule, malgré le bazar ambiant de son enfance, malgré le déséquilibre constant de ses parents, malgré son incompréhension face aux bouleversements de son foyer. Un récit pour nous rappeler qu’il est possible de triompher de beaucoup de choses par soi-même et qu’il faut avoir foi en ce que l’avenir nous réserve.
- Une immense sensation de calme, Laurine Roux (Editions du Sonneur)
Avis : ⭐️⭐️⭐️
Atmosphère feutrée, sentiments incandescents, fables fantastiques : un cocktail surprenant pour un roman différent, oscillant entre rêve et réalité, entre eau et glace. Après la lecture de ce conte, ce sont les mots qui restent, ces mots bien choisis qui nous ont permis de nous échapper, de créer de l’espace, de ralentir notre souffle pour mieux nous transporter.
- Une mère modèle, Pierre Linhart (Anne Carrière)
Avis : ⭐️⭐️⭐️
Pierre Linhart trouve les mots justes pour illustrer la lente et progressive descente aux enfers de cette femme arrivée au bout de son bonheur. Ce n’est pas simple d’expliquer le délitement d’une vie, de souligner l’incapacité d’une personne à voir ce qui se joue devant ses yeux – exercice réussi pour l’auteur qui transforme son roman en véritable scénario, nous aidant à nous identifier à Florence, cette femme comme les autres.
Un grand merci aux fées des 68 premières fois : Charlotte, Eglantine, Nicole et Sabine !
Tagué:68premièresfois