
A 25 ans, Olivier Liron a été le plus jeune candidat à remporter Questions pour un champion plusieurs fois de suite. Ce livre est son histoire, la réalité loufoque d’une émission bien connue des Français, côté studios. Comme on voit sa vie défiler à l’instant de sa mort, Olivier Liron se remémore des moments clés de sa vie amoureuse à chaque question, à chaque moment de stress où la concentration doit rester la plus forte. Un roman drôle et touchant sur la différence et l’importance d’être soi-même.
Lorsque j’abordais une fille, elle se tournait de l’autre côté et continuait à parler de Fichte ou de Jean-Luc Godard sur un ton qui me faisait tout de suite comprendre qu’elle faisait partie d’une classe sociale qui me la rendait inaccessible. J’étais exclu économiquement, culturellement et sexuellement des villas secondaires à Cannes, de la philosophie de Deleuze et de la chatte de bourgeoise. Moi qui avais passé mon enfance sur un terrain de foot, qui n’étais jamais allé au cinéma et m’étais arrêté à Spinoza et à la masturbation solitaire, c’était mal parti.
J’ai commencé à sourire à la lecture du sous-titre : « romance télévisuelle avec mésanges ». Je n’avais pas encore compris la référence, mais je trouvais déjà que l’auteur avait de l’humour – et il ne m’a pas détrompée par la suite. Non seulement il nous embarque dans un suspense haletant où on redoute à chaque instant la bonne réponse de Renée-Thérèse, Caroline ou Jean-Michel. A chaque partie, on souffle de soulagement, c’est bon, cette manche et gagnée, à nous la suivante ! Malgré la tension dramatique, ou peut-être grâce à elle, l’ensemble du roman est un grand éclat de rire. Tout le monde fait les frais de l’humour satirique de l’auteur, qui leur fait la part belle avec beaucoup d’innocence et un air de ne pas y toucher déconcertant. Là où les conventions sociales nous diraient de mesurer nos propos, lui n’hésite pas à dire franchement ce qui lui traverse l’esprit. C’est franchement irrespectueux, et pourtant on s’esclaffe, on lui pardonne, on en redemande. Il faut dire, ce n’est pas tous les jours qu’on peut imaginer un potiron rusé sur le plateau de Questions pour un super champion !
Est-ce que toutes ces connexions entre sa vie et le jeu lui sont vraiment venues sur le moment? Est-ce que Madame François a vraiment traversé son esprit de à plusieurs reprises sur le plateau de Questions pour un super champion? Dans le récit, en tout cas, c’est du plus bel effet. La satire affectueuse du jeu télévisé est contrebalancé par de petites confessions intimes drôles et touchantes, sur la difficulté d’être différent et sur l’injustice de notre société qui n’accepte pas cette différence. Enfance, adolescence, vie d’adulte, rien ne semble avoir été bien simple pour Olivier Liron et il a sûrement fallu du courage pour coucher tout ça sur le papier, avec suffisamment de recul pour en rire.
Léger, drôle et pourtant diablement intelligent et pertinent, Einstein, le sexe et moi est un deuxième roman très réussi, un beau mélange entre satire, humour et récit de vie.
« Je suis autiste Asperger. Ce n’est pas une maladie, je vous rassure. C’est une différence. Je vais vous raconter une histoire. Cette histoire est la mienne. J’ai joué au jeu télévisé Questions pour un champion et cela a été très important pour moi. »
Nous voici donc en 2012 sur le plateau de France 3 avec notre candidat préféré. Olivier Liron lui-même est fort occupé à gagner ; tout autant à nous expliquer ce qui lui est arrivé. En réunissant ici les ingrédients de la confession et ceux du thriller, il manifeste une nouvelle fois avec l’humour qui est sa marque de fabrique, sa très subtile connaissance des émotions humaines.
Ma mère a toujours rêvé la France, le pays des idéaux, des droits de l’homme, de Jean-Jacques Rousseau, de Napoléon Bonaparte et de Nicolas Hulot. Ma mère vient d’une famille d’ouvriers, il fallait absolument être bon à l’école, et elle m’a transmis ça. C’était le seul moyen de s’en sortir. Je suis fier de ça, de cet héritage qu’elle m’a légué, et même si l’école n’est plus tout à fait l’ascenseur social qu’elle était pour ma mère, j’ai tout fait pour suivre les études les plus longues possibles. J’ai eu un parcours d’élève modèle. Baccalauréat à 17 ans, classe préparatoire littéraire à 18 ans, entrée à l’Ecole normale supérieure à 20 ans. Agrégé à 23 ans. Enseignant à la Sorbonne à 24 ans. Julien Lepers à 25 ans. Dépucelage à 26 ans. Dépression à 27 ans. Mais c’est une autre histoire.
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Tagué:Rentrée Littéraire 2018
Un beau mélange qui me tente bien
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