Ásta Jón Kalman Stefánsson Editions Grasset Rentrée littéraire 2018

Comment résumer tant de vies en quelques lignes ? Grasset l’a très bien fait sur la quatrième de couverture, et pourtant ce petit texte récapitulatif est loin d’exprimer la complexité de ce qui se raconte dans ces pages. C’est l’histoire d’une famille entière, née d’un amour passionné, détruite par la folie d’une mère, puis reconstruite différemment, comme ils ont pu, pour trouver un peu de bonheur après la tempête. Tout ça au milieu des fjords et des aurores boréales, de la littérature islandaise et des éléments déchaînés.

Vous n’avez pas tout compris à mon résumé de l’histoire ? Lisez donc le livre, il en vaut la peine. Une grande fresque islandaise où de nombreux personnages aux passés troublés et inavoués s’entremêlent pour nous donner de grandes leçons sur le sens de la vie, l’importance de la famille et de l’amitié, et les dangers d’un amour trop grand. Il y a certes Sigvaldi, Helga, Ásta et Jósef, mais il y a aussi les autres, ceux qui croisent leur chemin et qui enrichissent leur parcours de leur présence. Tous recherchent un bonheur simple et inatteignable, tous prennent des décisions qui les en détourne, bien malgré eux. En quelques 490 pages, Jón Kalman Stefánsson nous raconte l’essentiel de la vie, tout ce qu’elle peut nous apporter, toutes les interrogations qu’elle suscite et tout ce que l’on peut manquer si on ne fait pas bien attention.

Ici, l’auteur n’est pas ce marionnettiste jouant avec ses personnages à son gré. Sous ses yeux ébahis, les personnages prennent la parole pour lire leurs lettres, raconter leur histoire, intervenir dans le récit à un moment où ça n’est pas vraiment cohérent. On assiste autant à la construction du roman qu’à son déroulé. L’auteur nous raconte ses moments d’écriture interrompus par des voisins bavards, ses résistances face au besoin d’expression de ses personnages, ses doutes et ses questionnements, inhérents à l’écriture d’un roman si ambitieux. Il intervient partout pour nous donner à réfléchir sur les évènements racontés, sur les décisions prises, sur les concours de circonstances décrits. Il alterne les styles, joue avec les titres, délaisse la chronologie, autant de procédés littéraires qui nous happent, nous entraînent et nous laissent longtemps dans le sillage de cette histoire passionnante. Pour vous dire, je n’arrive pas à me remettre dans un livre depuis presque une semaine, j’aurais voulu continuer mon chemin avec Ásta.


Résumé de l’éditeur :

Reykjavik, au début des années 50. Sigvaldi et Helga décident de nommer leur deuxième fille Ásta, d’après une grande héroïne de la littérature islandaise. Un prénom signifiant – à une lettre près – amour en islandais qui ne peut que porter chance à leur fille… Des années plus tard, Sigvaldi tombe d’une échelle et se remémore toute son existence  : il n’a pas été un père à la hauteur, et la vie d’Ásta n’a pas tenu cette promesse de bonheur.
Jón Kalman Stefánsson enjambe les époques et les pays pour nous raconter l’urgence autant que l’impossibilité d’aimer. À travers l’histoire de Sigvaldi et d’Helga puis, une génération plus tard, celle d’Ásta et de Jósef, il nous offre un superbe roman, lyrique et charnel, sur des sentiments plus grands que nous, et des vies qui s’enlisent malgré notre inlassable quête du bonheur.


Mais un parfois ne suffit pas à combler toute une existence. Parfois, je peux t’embrasser, parfois, je peux t’étreindre, parfois je peux m’endormir en écoutant ton souffle, parfois, je me réveille en l’entendant encore et tu murmures mon nom. Parfois, c’est comme rarement. Parfois ne veut pas dire souvent, mais seulement de temps en temps. Parfois signifie qu’il se passera longtemps jusqu’à la prochaine fois, et que par conséquent, tu es condamné à être malheureux. Puis les bâtiments s’effondrent sur ta vie.

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