Le Roman de Jeanne Lidia Yuknavitch Editions Denoël The Unamed Bookshelf Rentrée littéraire 2018 Science-fiction Anticipation

Découvert grâce à un article élogieux d’Usbek et Rica, ce roman atypique m’a attiré à la fois par son histoire librement inspirée de l’Histoire réelle, mais aussi par sa couverture absolument magnifique – avouons-le. Ici, Lidia Yuknavitch reprend les éléments constitutifs de l’histoire de Jeanne d’Arc (voix mystérieuses, mission céleste, bûcher) pour recréer cette héroïne au XXIème siècle, au moment où la Terre bascule, et l’humanité avec. C’est d’abord par flash-back que nous est racontée l’histoire de Jeanne, cette enfant atypique, ayant une connexion si particulière à la nature : Christine nous raconte la version censurée, plébiscitée par Jean de Men au sein du CIEL. Dictature, rébellion, talents artistiques et fin du monde, c’est un cocktail explosif qui nous est servi, une histoire pleine de rebondissements imprévus, impromptus, plus surprenants les uns que les autres, parfois même carrément choquants. Si l’auteur nous livre une vision très peu glorieuse du futur de l’humanité – si tant est qu’on puisse parler d’un futur, elle lui oppose une description émerveillée de la Terre et de ses ressources, même les plus infimes. Les insectes sont source d’émerveillement tandis que les hommes, ces créatures qui se croyaient si supérieures, sont présentées comme totalement grotesques. Le message est clair : arrêtez de vous prendre pour le nombril du monde et prenez soin des choses incroyables que la Terre vous a donné, vous pauvre humains irresponsables !

Ce message écologiste s’accompagne d’une réflexion plus profonde sur la nature même de l’être humain. Quand tout a été détruit, quand la vie humaine n’a plus aucun sens, quand la survie devient la seule réalité, tous ces personnages continuent à ne rechercher qu’une seule chose : l’amour. Le sentiment amoureux domine tout le récit, guide les actes de chacun, qu’ils soient héroïques ou sacrificiels. Les humains sont-ils donc des êtres profondément sentimentaux ? C’est ce que fait valoir l’auteur et c’est la perte de ce sentiment amoureux qui semble détruire les hommes, encore plus que la perte de leur planète. Seules quelques femmes, incroyablement fortes et résolues, continuent à porter en elles cet amour indescriptible et c’est cette force intérieure qui leur permet de retourner le cours de l’histoire.

Foisonnant, complexe et complètement stellaire, Le Roman de Jeanne est un livre exigeant, plein de messages et d’alertes pour nous autres, pauvres humains. Le style unique de l’auteur sert magnifiquement cette prédiction néo-dramatique et pourtant optimiste sur la capacité de destruction et de renouvellement des hommes.


Résumé de l’éditeur :

Anéantie par les excès de l’humanité et des guerres interminables, la Terre n’est plus que cendres et désolation. Seuls les plus riches survivent, forcés de s’adapter à des conditions apocalyptiques. Leurs corps se sont transformés, albinos, stériles, les survivants se voient désormais contraints de mourir le jour de leurs cinquante ans. Tous vivent dans la peur, sous le joug du sanguinaire Jean de Men.
Christine Pizan a quarante-neuf ans. La date fatidique approche . Rebelle, artiste, elle adule le souvenir d’une héroïne, Jeanne, prétendument morte sur le bûcher. Jeanne serait la dernière à avoir osé s’opposer au tyran. En bravant les interdits et en racontant l’histoire de Jeanne, Christine parviendra-t-elle à faire sonner l’heure de la rébellion?


L’amour n’a jamais prétendu être plus que de simples impulsions électriques qui traversent la matière… mais ce n’est pas rien ! Le pouls de la Terre, les courants telluriques, ce n’est pas rien. C’est ce qui fait la vie. La vie dans l’univers, à l’échelle cosmique ou atomique. Mais nous, nous avons voulu nous l’approprier. Entre nous. Pour nous. Nous avons fait de cette énergie une chose petite, une chose privée, afin de nous démarquer des autres créatures. Nous l’avons enfermée dans un mot, puis dans une histoire, puis dans une excuse pour nous soucier de nous-même au détriment du reste de la planète. Nos raisons d’aimer étaient plus fortes que tout le reste.
Les étoiles n’ont jamais été là pour nous : ce n’est pas pour nous que brille le ciel nocturne.
Les étoiles, c’est nous.

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