La fractale des raviolis Pierre Raufast Folio The Unamed BookshelfUne fractale est comme une poupée russe : elle renferme à l’intérieur d’elle-même un nombre incalculable d’objets similaires. On part donc d’une histoire de raviolis et de meurtre, on enchaîne sur une histoire de prostitution manquée, on continue avec une histoire de génie incompris et de gros sous, on revient sur quelques histoires de meurtres en tous genre, on fait un détour par une ou deux histoires d’impostures…

C’est indéniable : l’histoire de ce plat de raviolis faisait partie du Grand Tout : son destin était scellé depuis quatre milliards et demi d’années. Pourtant, à cette époque, la planète Terre était encore toute jeune. Pas de rats-taupes, pas de raviolis, pas d’Olympiens ni d’Olympique de Marseille, pas même de Lune. Il a fallu attendre quelque vingt millions d’années pour qu’une spectaculaire collision avec l’objet céleste Théia donnât naissance à notre satellite. Puis encore quatre milliards et demi d’années pour que les premiers Homo sapiens s’aventurent sur ce point du globe que l’on nomme désormais Maubeuge, s’y émeuvent d’un clair de lune, se reproduisent frénétiquement et créent toutes ces vicissitudes maintenant concentrées en un dilemme dont Corneille n’aurait pas même conçu la possibilité – puisqu’il ignorait tout des raviolis.

Vous l’aurez compris ce récit est foisonnant ! Pourquoi se contenter d’un seul récit quand on peut digresser à l’infini sur les liens de causalité d’un récit avec un autre ? C’est là tout le génie de Pierre Raufast qui, sous couvert de nous conter une histoire de raviolis, nous entraîne à travers le monde et les âges, imbriquant chaque récit dans le précédent, avec tellement d’adresse que nous, lecteurs, suivons le cours de sa pensée en trouvant tout ça très logique, finalement. Un vrai roman gigogne comme il sait si bien les faire et que j’avais découverts avec La baleine thébaïde, autre réussite du genre.

Premier roman de Pierre Raufast, on se demanderait presque s’il ne s’agirait pas d’un défi d’écriture : raconter un maximum de choses n’ayant en apparence aucun rapport entre elles en 236 pages, le tout avec dérision et imagination. Sacré défi ! C’est pourtant réussi haut la main, tant on se délecte de l’humour décalé de l’auteur, et de son imagination hors normes. Contes, extraits de polars ou de romans sentimentaux, structure théâtrale, réflexions philosophiques, il se joue de tous les styles et introduit des bribes d’informations diverses, des stratégies militaires aux molécules présentes dans les baies d’açaï, en passant par les pesticides et les poèmes de Baudelaire. C’est bien fait, ça se lit d’une traite, on enchaîne les courts chapitres, on perd le fil, on le cherche en feuillant les pages sans le retrouver, et puis tant pis, on continue, on se prend au jeu, et arrivés au bout, on a l’impression d’avoir vécu sacrément beaucoup de choses.


Résumé de l’éditeur:

« »Je suis désolé, ma chérie, je l’ai sautée par inadvertance. » Je comprends que l’on puisse sauter une femme par dépit, par vengeance, par pitié, par compassion, par curiosité, par habitude, par intérêt, par gourmandise, et même parfois par amour. Par inadvertance, ça non.»

Comment se venger d’un mari volage? En l’empoisonnant avec son plat préféré. Mais rien ne se passe comme prévu et c’est tout un engrenage qui se met en place.

Un premier roman gigogne d’une inventivité rare, qui nous fait voyager dans l’espace et le temps.


Aujourd’hui on n’invente plus grand-chose. Celui qui détient l’armement le plus performant détruit les infrastructures de l’autre. Et l’autre réinvente la guérilla urbaine avec des moyens du siècle dernier. Et ça s’enlise. Et ça traîne… Au moins, du temps d’Alexandre le Grand ou de Jules César, ça avait de la gueule. Quarante mille soldats face à face dans un grand champ. La victoire dépendait de la tactique, de vrais choix de positions, d’attaques, de défenses. Une partie d’échecs puissance dix. Aujourd’hui, sur les cartes d’états-majors, nous ne faisons qu’imiter ou reproduire les figures héritées de quelque trois mille ans d’expérience.

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