Les dieux du tango Carolina de Robertis Livre de Poche Prix des Lecteurs The Unamed Bookshelf📘Prix des Lecteurs du Livre de Poche 2019

Dans les années 20, il ne fait pas bon être une femme, ni en Italie, ni en Argentine : les femmes sont reléguées aux corvées dès leur plus jeune âge et nombre d’interdits entravent leur liberté. Arrivée à Buenos Aires, Leda découvre que son mari est mort, la laissant sans ressources mais étonnement libre de faire ce qu’elle veut, pour la première fois de sa vie. Et ce qu’elle veut, c’est jouer du violon, même si c’est interdit aux femmes. Troquant ses vêtements contre ceux de Dante, elle se trouve une place de musicien dans le monde de la nuit, et sa vie change – à jamais.

Après Orlando, je retrouve ici encore la question de l’ambivalence des sexes, de tout ce que l’on autorise aux hommes et que l’on refuse aux femmes, et de la possibilité de se couler dans un autre sexe avec aisance, hommes et femmes étant finalement bien peu différents. Ici, même si l’intrigue ne manque pas d’intérêt, on ne peut s’empêcher de remarquer la simplicité désarmante avec laquelle Leda devient Dante, sans grands obstacles, juste une peur latente d’être découverte – ce qui ne l’empêche pas de se prêter à des jeux sexuels risquant de mettre à jour l’absence de ses attributs masculins.

Les dieux du tango nous offre une plongée dans le Buenos Aires de l’entre-deux-guerres, une ville pleine d’immigration et de pauvreté, de luxure et de perdition, le tout sur fond de musique lascive. Carolina de Robertis dédie des pages entières à la description de cette ambiance, de cette musique, de cette ville si particulière, c’est très vivant et en même temps un peu répétitif. Un certain nombre d’histoires s’entrecroisent, celles des différents personnages croisés au hasard, musiciens, chanteurs, conventillos, prostituées… Destins entrelacés où la volonté triomphe toujours des difficultés, des violences et de la pauvreté.

Somme toute, c’est un roman qui se lit assez bien même si certaines passages traînent en longueur et manquent de crédibilité, c’est divertissant à défaut d’être mémorable.


Résumé de l’éditeur:

Février 1913. Leda a dix-sept ans. Elle quitte son village italien pour rejoindre en Argentine son cousin Dante, qu’elle vient d’épouser. Dans ses maigres bagages, le précieux violon de son père. Mais à son arrivée, Dante est mort. Buenos Aires n’est pas un lieu pour une jeune femme seule, de surcroît veuve et sans ressources : elle doit rentrer en Italie. Pourtant, l’envie de découvrir ce nouveau monde et la musique qui fait bouillonner les quartiers chauds de la ville la retient. Passionnée par ce violon interdit aux femmes, Leda décide de prendre son destin en main. Déguisée en homme, elle s’immerge dans le monde de la nuit, le monde du tango. Elle s’engage tout entière dans un voyage qui la mènera au bout de sa condition de femme, de son art, de la passion sous toutes ses formes, de son histoire meurtrie. Un voyage au bout d’elle-même.


Nous travaillons tous si dur pour nous en sortir, pensait-elle, pour jouer le rôle qu’on a choisi ou qui a été choisi pour nous. Nous nous endormons au beau milieu de la journée, les yeux grands ouverts, nous parlons et nous rions, nous poissons, nous nous battons, nous marchons tout endormis, pris dans un rêve dans lequel le costume que nous endossons menace de dévorer qui nous sommes vraiment. Et peut-être qu’au bout d’un moment c’est ce qui se passe. Peut-être que les parties de nous qui n’atteignent jamais la surface se font manger peu à peu et finissent par disparaître. Les parties de moi que je ne suis plus. La Leda du village, la Leda en jupe, la Leda qui ne touchera plus jamais une femme.

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