L'extase du selfie Philippe Delerm Editions du Seuil The Unamed Bookshelf

Dans ce petit livre d’une centaine de pages se cachent nos plus adorables ou ridicules « TOC » des temps modernes, toutes ces attitudes que nous nous donnons par convention sociale ou pour nous insérer dans l’air du temps. Certains m’ont parlé, d’autres beaucoup moins, mais il faut avouer que Philippe Delerm a une manière très poétique de les décrire, une façon bien à lui de les percevoir et de les analyser. Vous et moi, nous ne faisons pas attention à tout ça, nous avons oublié les raisons profondes qui nous poussent à agir de telle manière ou de telle autre dans notre quotidien, mais lui le voit toujours et décortique patiemment nos petites attitudes inconscientes.

C’est agréable à lire, doux et poétique et pourtant, j’ai très souvent reposé ce livre pour lui préférer un bon vieux roman, voire même un essai, tout simplement pour retrouver un livre avec plus de trame ou d’intrigue, quelque chose d’un peu plus entraînant. Je crois que la poésie, même en prose et aussi accessible que celle de Philippe Delerm, n’est pas forcément mon style littéraire de prédilection, moi qui ai si peu de temps pour lire et cherche souvent dans la lecture un échappatoire plus durable que celui que peut m’offrir un instantané littéraire d’une page ou deux.


Résumé de l’éditeur:

Et vous, quel geste vous trahit ?

Il y a les gestes qui disent l’embarras, d’autres la satisfaction de soi, certains encore le simple plaisir d’exister, là maintenant, sur cette terre. Mais tous nous révèlent, dans nos gloires comme nos petitesses, nos amours comme nos détestations :

  • le selfie, geste roi de nos vies modernes ;
  • le « vapotage », qui relègue l’art de fumer à un plaisir furtif, presque honteux ;
  • les hommes de pouvoir qui se grattent le dessous de leur chaussette ;
  • cette façon qu’on a parfois de tourner le volant avec la paume de la main bien à plat ;
  • un verre qu’on tient à la main sans le boire…

À lire Philippe Delerm, on se dit souvent : « Mais oui, bien sûr, c’est exactement cela ! » Mais lui seul aura su décrire ces gestes du quotidien avec tant de finesse et de vérité – tant de profonde analyse de la nature humaine.

Inventeur d’un genre dont il est l’unique représentant, l’« instantané littéraire », Philippe Delerm s’inscrit dans la lignée des grands auteurs classiques qui croquent le portrait de leurs contemporains, tels La Fontaine ou La Bruyère. Il est l’auteur de nombreux livres à succès, dont La Première Gorgée de bièreJe vais passer pour un vieux con ou Sundborn ou les Jours de lumière (prix des libraires, 1997).


On vient de vous offrir ce livre. Il recèle par essence une promesse de solitude, d’éloignement, de silence. Mais pour l’instant vous en parlez : oui, j’avais envie de le lire, non je ne l’ai pas, j’avais bien aimé le précédent, un peu moins le succès d’il y a cinq ou six ans… Le livre est posé sur la cuisse. Presque machinalement, on passe la paume de la main sur la quatrième de couverture. Au-delà des propos conventionnels que l’on continue d’échanger, on sent alors une forme d’apaisement. C’est un volume que l’on touche, que l’on éprouve sous la surface.

C’est curieux. Le babil autour de l’objet se poursuit, très consensuel et convenu, mais délicieusement le contact de la main vous emporte loin, malgré la sagesse apparente des postures. C’est froid et chaud à la fois, lisse comme la perfection d’un autre monde. Bien sûr, la personne qui vous l’a offert est amoureuse comme vous de la lecture. Pas plus que vous, elle n’est dupe de ces secondes où elle débite à son tour un rôle appris : j’ai beaucoup aimé, ça fait partie de ces bouquins qu’on n’a pas envie de finir, longtemps je me suis gardé les trois dernières pages…

Mais sous cet échange sincère plane comme une hypocrisie réciproque et nécessaire. Il faut bien que ce soit un objet d’une valeur ambiguë – affective et marchande.Nous savons tous deux que le livre est fait pour dépasser nos vies, nos rituels, et nos soirées ensemble. On passe la paume sur la couverture. Il n’est pas encore tout à fait à moi. Sans le regarder, je touche et je pressens. Déjà c’est lui qui me possède.

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