La courage des autres, Hugo Boris Editions Grasset Grand Prix des Lectrices Elle 2020 The Unamed Bookshelf🙋🏼Grand Prix des Lectrices Elle 2020

Dans cet herbier d’un nouveau genre, Hugo Boris nous explique son cheminement pour vaincre sa peur panique de la violence et son conditionnement social, similaire à celui que nous avons tous, et qui se révèle avec acuité dans les transports en commun. Passant de la sidération, à l’admiration puis à l’affirmation, il devient cet homme capable de s’interposer dans l’espace public pour défendre les autres ou les aider, ce héros ordinaire qu’il avait toujours rêvé d’être.

Ce petit recueil d’anecdotes m’a particulièrement touchée, en cette période où nous sommes privés des transports en commun. Il offre une fine analyse de cette jungle humaine qu’est le métro parisien, espace privilégié où se mélangent toutes sortes de gens, travailleurs, sans-abris, touristes, passants oisifs, petites frappes et gros caïds. Hugo Boris ne prend pas de pincettes pour exposer au grand jour ce qui fait le quotidien de nombreux franciliens qui empruntent les transports tous les jours : l’ignorance des autres, l’instinct de préservation et la peur irrationnelle d’une atteinte à notre personne. C’est une leçon de violence ordinaire qu’il nous met devant les yeux, cette violence physique, psychologique ou verbale gratuite à laquelle nous avons tous déjà été confrontés dans ces tunnels obscurs, mais contre laquelle nous ne faisons le plus souvent absolument rien.

Hugo Boris magnifie cet espace souterrain, lieu de tous les apprentissages, et les personnes qui le traverse en captant de petits moments anodins que la plupart d’entre nous ne remarquent plus : cette femme partant d’un éclat de rire parce qu’elle n’arrive pas à prendre l’escalator, cet enfant attentif face à un clochard ignoré, cette amie prenant la défense d’un homme critiqué pour ses croyances. Certaines anecdotes, tirées de sa propre histoire sont carrément hilarantes, celle du M16 notamment, que j’ai raconté lors de tous mes apéros virtuels.

Un joli moment de lecture, auquel je penserai avec émotion quand il me sera donné d’emprunter à nouveau le métro.


Résumé de l’éditeur :

Hugo Boris vient de passer sa ceinture noire de karaté lorsqu’il fait face à une altercation dans le RER. Sidéré, incapable d’intervenir, il se contente de tirer la sonnette d’alarme. L’épisode révèle une peur profonde, mélange d’impuissance et de timidité au quotidien. Trait de caractère personnel ou difficulté universelle à affronter l’autre en société ? Ce manque de courage l’obsède. Sa femme lui suggère de «  se faire casser la gueule une bonne fois pour toutes  » pour l’exorciser.

Mais Hugo Boris est écrivain, alors, pendant quinze ans, il consigne sur le vif ces situations d’effroi dans les transports en commun. Il peint aussi le ravissement d’une rencontre, l’humanité d’un dialogue, l’humour d’un échange imprévu. À travers ces miscellanées heureuses ou tragiques, il décrypte une mythologie contemporaine, celle du métro et du RER, et cherche à appréhender ses craintes, à la maîtriser par la distance, la littérature ou… la lecture de Dragon Magazine  !

Totalement original, sincère, d’une actualité, d’une précision d’écriture et d’observation remarquables, ce recueil de textes brefs touche au plus juste. En se mettant à nu, Hugo Boris parle de chacun de nous, de nos lâchetés et de nos malaises quotidiens, de nos éblouissements et, parfois, de nos héroïsmes.


À Goncourt, un clochard d’une trentaine d’années pénètre lourdement dans la rame, une cannette de bière à la main. Tout le monde se détourne en l’évitant soigneusement du regard.À République, un petit garçon de trois ans monte dans le compartiment avec son père, lève bien haut le genou pour franchir l’écart entre le quai et le train. Le métro redémarre. L’enfant, debout près de la porte, regarde l’ivrogne assis sur le strapontin à sa hauteur. Il le dévisage longuement. On était tous là à tourner la tête pour l’exclure, le chasser mentalement du wagon, lui infliger la mort blanche, il suffisait de ne pas le voir pour qu’il n’existe pas, et voilà ce garçon de trois ans qui n’est pas au courant, qui ne connaît pas les codes, qui le ressuscite de son regard et qui, de son attention tranquille, le ramène du côté des vivants.

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