J'avais une île Lorenze Pieri Editions Préludes The Unamed BookshelfTeresa grandit loin du monde, sur une île sauvage au large de la Toscane, ce qui définira le reste de sa vie, et fera d’elle une insulaire, à jamais. Ce livre est son histoire, un roman qui se lit d’une traite et qui nous transporte à travers les grands bouleversements de l’Italie récente pour nous donner un aperçu de leur impact sur la vie d’une jeune femme comme les autres. Teresa a beau être une enfant, puis une femme émotive, effacée, transparente presque, c’est un personnage auquel on s’attache. Son incapacité à faire des choix pour elle-même, à se dresser contre l’avis des autres dans cette famille où les femmes sont pourtant de fortes têtes la rend délicate et fait d’être une victime de sa propre vie – comment ne pas s’identifier à un personnage pareil ?

L’aperçu que l’auteure nous montre de l’Italie d’aujourd’hui n’est guère flatteur : corruption étatique ancrée dans les moeurs, crise financière dramatique après 2008, dépendance très forte du pays au tourisme – autant de faits qui rendent le monde de notre petite Teresa incertain et hostile. Comment trouver sa place dans un tel pays quand on n’a connu que l’écrin protégé d’une île où seules quelques luttes idéologiques trouvaient ancrage ? Loin de son île, Teresa se perd, elle s’égare plus que jamais, dans une vie qui ne lui ressemble pas, mais peut-être pour mieux se retrouver ensuite. C’est dans les épreuves que se révèle toute la force de ce personnage en retrait, de cette femme qui semble passive au premier abord – en refermant ce livre, j’avais plus d’estime pour elle que pour sa farouche soeur, Catarina, qui avait su prendre en main sa vie bien plus tôt.

A travers un voyage passionnant dans l’Italie d’hier et d’aujourd’hui, une histoire de femmes flamboyantes, chacune à sa manière, Lorenza Pieri nous offre un beau roman d’apprentissage qui nous encourage à ne pas passer à côté de la vie, et à préserver toujours notre « île », notre identité, notre nature profonde et la nature qui nous entoure et sublime notre existence, comme elle a sublimé celle de Teresa.


Résumé de l’éditeur:

Une île minuscule, au large de la Toscane. C’est là, dans les années soixante-dix, que naissent deux soeurs, Caterina et Teresa.
Dans cette famille insulaire, les caractères sont bien trempés, à commencer par Elena, leur mère, que l’on surnomme « La Rouge » pour sa chevelure flamboyante, mais surtout pour ses idées politiques. Vittorio, leur père, éternel Hédoniste, mène son existence comme bon lui semble, tandis que Nonnalina, leur grand-mère, traverse l’existence avec une force résignée, héritage de la guerre qui a bouleversé sa vie.
Caterina, l’aînée, subjugue et domine Teresa, qui, pour trouver sa place, devra apprendre à se détacher de sa terre comme de sa famille. Lorsque arrive l’âge adulte, et le temps des décisions, saura-t-elle apprivoiser la nostalgie de son enfance pour se construire un avenir ?

Entre roman d’apprentissage et saga familiale, ce livre magnétique articule avec brio les destins individuels et celui d’un pays, montrant comment l’Histoire afflue partout, jusque sur les côtes d’un petit paradis perdu.


Mais je n’écoutai rien, j »avais vu ma mère à la télévision, j’avais vu son visage sur le rectangle noir qui montrait le monde, le vrai, celui qui existait dehors, et le faux, celui des dessins animés, et de tout ce qui arrivait et qui ne faisait pas partie de notre vie sur l’île, qui nous semblait si loin de tout. Et voilà que ma mère était là-dedans, tout en étant, au même instant, à trente centimètres de moi. Soudain, tout nous parut proche, et ce fut là l’épiphanie de mon enfance, qui consacra définitivement ma mère comme un être surnaturel. Elle était celle qui savait et faisait l’Histoire, elle était celle – comme ma grand-mère d’ailleurs – que je ne pourrais jamais égaler. Et notre monde isolé, maintenant qu’il était apparu là-dedans, semblait, pour la première fois, aussi réel que le reste.

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