Né d'aucune femme, Franck Bouysse, Livre de Poche, Grand Prix des Lectrices Elle 2019, The Unamed Bookshelf

Né d’aucune femme a eu un retentissement rare depuis sa parution en grand format, au point d’être décrit par beaucoup comme un véritable chef d’oeuvre. Autant vous dire que mes attentes étaient très hautes quand j’ai ouvert ce livre – et que, même si j’en ai apprécié la lecture, je ne me joindrais pas au coeur unanime de ceux qui l’ont inscrit dans leur Panthéon.

L’histoire de Rose, cette jeune fille de quatorze ans vendue par son père à un maître sadique franchement dérangé, m’a émue, j’ai admiré son courage, tremblé avec elle à chaque montée de l’escalier, sauté de joie à chaque rencontre avec Edmond. L’atmosphère pesante du récit, l’omniprésence de cette nature menaçante, l’alternance des points de vue des différents personnages crée un suspense perturbant, qui nous pousse à continuer à lire tant que nous n’aurons pas eu le fin mot de l’histoire. Dès les premiers chapitres, le ton est donné, c’est énigmatique, tendu, nerveux, on ne sait pas qui parle, ni ne comprenons vraiment ce qu’il dit. Ouvrir ce livre, c’est plonger dans un univers de noirceur comme vous en avez rarement connu dans votre vie, examiner les méandres de l’âme humaine, jusqu’au recoins les plus vils et méprisables.

Une lecture addictive sans aucun doute, avec un style propre, une voix distincte, celle d’un auteur ancré dans la terre, utilisant des lieux et des faits piochés au hasard et qui, mis ensemble, donnent un récit bien ficelé, plein de rebondissements et de rendez-vous manqué – mais un chef d’oeuvre ? C’est peut être trop ambitieux pour moi.


Résumé de l’éditeur:

« Mon père, on va bientôt vous demander de bénir le corps d’une femme à l’asile.
– Et alors, qu’y a-t-il d’extraordinaire à cela ? demandai-je.
– Sous sa robe, c’est là que je les ai cachés.
– De quoi parlez-vous ?
– Les cahiers… Ceux de Rose. »Ainsi sortent de l’ombre les cahiers de Rose, ceux dans lesquels elle a raconté son histoire, cherchant à briser le secret dont on voulait couvrir son destin.


Les mots, j’ai appris à les aimer tous, les simples et les compliqués que je lisais dans le journal du maître, ceux que je comprends pas toujours et que j’aime quand même, juste parce qu’ils sonnent bien. La musique qui en sort souvent est capable de m’emmener ailleurs, de me faire voyager en faisant taire ce qu’ils ont dans le ventre, pour faire place à quelque chose de supérieur qui est du rêve. Je les appelle des mots magiciens : utopie, radieux, jovial, maladrerie, miscellanées, mitre, méridien, pyracantha, mausolée, billevesée, iota, ire, parangon, godelureau, mauresque, jurisprudence, confiteor, et tellement d’autres que j’ai retenu sans effort, pourtant sans connaître leur sens. Ils me semblent plus facile à porter que ceux qui disent. Ils sont de la nourriture pour ce qui s’envolera de mon corps quand je serai morte, ma musique à moi. C’est peut-être ce qu’on appelle une âme. 

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