
Avec De grandes ambitions, Antoine Rault nous entraîne dans une fresque historique française ambitieuse justement, où les quarante dernières années sont évoquées à travers les destins de nombreux personnages, plus ou moins en rapport les uns avec les autres, plus ou moins importants et influents dans notre pays. Il évoque la transformation de notre société, des débuts du Minitel au triomphe de la 4G, de la victoire de la méritocratie à la montée des extrémismes, à travers le portrait d’une génération obsédée par la réussite, le statut social et l’enrichissement personnel, une génération aujourd’hui dépassée par les événements récents, peinant à trouver sa place dans un monde en perpétuel mouvement.
La quatrième de couverture m’avait prédit une lecture riche et inédite, un aperçu d’une France que je n’ai pas connue, si proche et pourtant révolue. Ce n’est pas vraiment ce que j’y ai trouvé. J’ai suivi les tribulations d’hommes et de femmes prêt.e.s à tout pour réussir, au mépris des autres et parfois d’eux-mêmes, des caricatures légèrement grossières de personnages que je suis dans les médias depuis des années. Emmanuel et Brigitte Macron, Xavier Niel, Rachida Dati, Marine Le Pen, Florian Philippot, Jérome Kerviel, Bernard Arnault, c’est une sacré galerie de personnages réels qu’Antoine Rault affiche dans son roman. Parmi eux, quelques « inconnu.e.s » se glissent : une chirurgienne, une actrice, un professeur d’université-romancier, qui ressortiront gagnants de la loterie de la vie, comme si les personnages fictifs avaient finalement plus de chance que leurs homologues réels.
Les faits historiques se succèdent, plus ou moins rapportés à l’identique, tous abordés brièvement – la marche de l’histoire n’attend pas. Certains ne semblent toucher qu’un seul personnage dans notre galerie, comme les attentats de Novembre 2015, que Clara vit, mais pas les autres apparemment. Si les faits sont là, la chronologie est en revanche toute chamboulée, selon une logique qui m’échappe, et tous les personnages interagissent comme s’ils étaient seuls dans ce panier de crabes au sommet de la France. C’est un peu facile à mon goût, ça manque d’imaginaire et de romanesque – dommage.
Que deviennent nos rêves de jeunesse ? Nos illusions ? Comment accepter d’être ce que nous sommes devenus ? Ce que le temps, le pouvoir, ont fait de nous ?
Dans ce roman choral qui se déploie des années 1980 à nos jours, Antoine Rault compose une subtile mosaïque de destins intimement mêlés, sur laquelle plane l’ombre de John Dos Passos. On y croise Sonia, fille d’une femme de ménage marocaine ; Marc, petit génie de l’informatique et son ami d’enfance Stéphane, tous deux d’origine modeste ; Clara qui veut devenir médecin et sa sœur Diane qui rêve de brûler les planches… Ministre, tycoon de l’internet, conseiller en communication, chef d’un parti d’extrême droite, actrice, chirurgienne, écrivain… voire président de la République, tous tenteront d’atteindre le sommet ou de rester fidèle à leurs idéaux. Et chacun verra ses ambitions couronnées de succès ou déçues.
Avec De grandes ambitions, l’auteur remarqué de La Danse des vivants nous livre une fresque fascinante, un portrait troublant de vérité de la génération X, celle qui a grandi avec l’apparition du sida, la révolution numérique et la mondialisation.
Stéphane se dit que Stanislas était vraiment le prototype de la classe dirigeante incapable de remettre en question le modèle dans lequel il a toujours vécu parce qu’il a profité depuis sa naissance de ce que ce modèle pouvait offrir de meilleur. Un somnambule satisfait qui se croit parfaitement éveillé. Il ne voit pas qu’on va dans le mur. Il ne voit pas qu’on court à notre perte. Stéphane, lui était convaincu que, comme le communisme, le capitalisme libéral avec sa croyance au progrès par la multiplication des échanges, avec ses bons sentiments inscrits dans les droits de l’homme, touchait à sa fin. Ce système laissait de plus en plus de monde sur le bord de la route, en France, en Europe, en Amérique. Ce système creusait les inégalités entre les riches et les pauvres. Ce système abrutissait la jeunesse qui perdait le sens de l’effort et du dépassement de soi… Stéphane avait cette intuition que de nouvelles guerres se préparaient entre riches et pauvres, entre ceux qui avaient et ceux qui n’avaient pas. Il ne savait pas encore comment cela se produirait, il ne savait pas encore quel nouveau monde en sortirait, mais il était certain qu’il fallait s’y préparer.
Plus d’informations et de citations sur Babelio.
Que de romans actuellement sur fonds d’événements politiques et sociétaux…. Un peu masse et je vais faire une pause et ton avis me le confirme 😉
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Certains sont vraiment excellents – je viens de finir « Comme un empire dans un empire » d’Alice Zeniter dont je parlerais prochainement sur le blog, j’ai beaucoup aimé. Mais certains sont moins bien fait, le traitement de l’information est décevant, et c’est malheureusement le cas ici à mon sens…
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dommage il aurait pu me tenter aussi mais ce sont des personnages de la vie politique trop contemporains je préfère quand on remonte plus loin dans l’Histoire 🙂
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Oui moi aussi en général mais là je pensais que ça allait être des histoires fictives – j’avais décidément rien compris 😂
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Pas facile de traiter du monde actuel et pourtant ce pourrait être utile. Est-ce que ce livre peut y contribuer ? Il semble y manquer la part de rêve, de fiction qui fait oeuvre. Tout ce que j’ai trouvé dans le livre de Renaud Xuotra mis sur mon blog ce matin.
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Cette part-là est essentielle à mon sens pour permettre à la littérature de susciter la réflexion, et de chambouler un lecteur…
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