Requiem pour une apache Gilles Marchand Aux forges de vulcain Rentrée littéraire 2020 The Unamed Bookshelf

Roman décalé s’il en est, Requiem pour une apache raconte la révolte d’une bande de laissés pour compte, installés dans un hôtel parisien décrépi, sous l’influence d’une nouvelle venue qui n’en peut plus de se laisser marcher sur les pieds. De bagarres en barricades, ils deviennent les idoles de tous les moqués, oubliés, mal-aimés de la capitale, voyant ainsi leur petite vie paisible de pensionnaires chamboulée à jamais. Distillant quelques mésaventures fantasques dans son récit, Gilles Marchand nous offre un livre rafraichissant d’humanité et de sincérité, un brin loufoque mais aussi délicatement sérieux, dont les « petites gens » sont définitivement les plus grands héros.

Il nous rappelle, avec ce récit un peu fou, à notre part d’enfance, enfouie mais toujours bien présente au fond de nous, avec ses rêves et sa vision naïve du monde, qui croit encore que tout est possible et fait pour nous rendre heureux. Alors que chaque personnage semble avoir fait le deuil de ses propres rêves et semble s’accommoder de la réalité telle qu’elle est, Jolene leur permet de renouer avec leurs espoirs déçus, de retrouver la fougue qu’ils avaient laissée sur le pas de la porte et de raviver leur envie de se battre pour exister.

Sacré histoire que celle-ci ! Je salue l’imagination débordante de l’auteur d’avoir réussi à me faire adhérer à une intrigue aussi tirée par les cheveux – même si j’avoue que le coup de la liquéfaction m’a légèrement déstabilisée… Si cette histoire tient la route, c’est surtout grâce à cette galerie de personnages formidablement attachants, simples et atypiques à la fois, dont les confessions, restituées petit à petit par le narrateur avec force jeux de mots et réflexions décalées, nous atteignent en plein coeur.


Résumé de l’éditeur:

Jolene n’est pas la plus belle, ni forcément la plus commode. Mais lorsqu’elle arrive dans cet hôtel, elle est bien accueillie. Un hôtel ? Plutôt une pension qui aurait ouvert ses portes aux rebuts de la société : un couple d’anciens taulards qui n’a de cesse de ruminer ses exploits, un ancien catcheur qui n’a plus toute sa tête, un jeune homme simplet, une VRP qui pense que les encyclopédies sauveront le monde et un chanteur qui a glissé sur la voie savonneuse de la ringardisation.


Jolene était effarée. Elle commençait à comprendre que nous étions tous égaux face à la littérature, à condition de prendre le risque de s’y perdre. Les livres ne font pas le distinguo entre les grands et les petits, les beaux et les moches. On lui avait fait croire que c’était un art difficile, qu’elle n’avait pas les armes ou qu’elle était trop bête pour lire des livres. On ne lui avait pas laissé le temps d’apprivoiser la littérature. Elle avait passé sa scolarité à craindre les livres comme s’il s’était agi d’un animal vaguement dangereux, ou tout au moins très intimidant. Elle ne s’en sentait pas digne parce qu’elle ne comprenait pas tout. Grâce à Annie, elle avait commencé à lire un peu de poésie, grâce à l’Amarcord de Paolo, elle avait compris qu’on pouvait se perdre dans une oeuvre comme dans une chanson. Marie-Pierre lui avait dit que dans les livres se trouvait tout ce qu’on ne pourrait jamais lui reprendre. Le savoir, les histoires. « On pourra te confisquer ton argent, ta montre, ta maison, ton travail. Même ta virginité et ton honneur peuvent être volés. Personne ne pourra jamais te voler les livres que tu as déjà lus. C’est pour ça que l’on fait croire aux pauvres et aux miséreux que la culture n’est pas faite pour eux : parce que l’on sait que s’ils parviennent à l’acquérir, jamais on ne pourra la leur reprendre. »

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