La très mirifique et déchirante histoire de l’homme qui inventa le livre de poche, Rolf Potts
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Publié le 8 janvier 2021

Dans ce tout petit livre, les Editions Inculte nous proposent de découvrir un destin atypique et admirable, celui d’Emanuel Haldeman-Julius, inventeur des « Petits Livres bleus », premières éditions de poche de l’histoire. C’est en pleine Première Guerre Mondiale que ce journaliste inspiré décide, pour sauver sa publication en déclin, l’Appeal to Reason, de créer une « maison d’édition qui utiliserait les presses du journal pour imprimer des livres bon marché portant sur une variété de sujets intellectuels et de société. » Socialiste convaincu, il voit dans cette initiative l’opportunité d’offrir au peuple, aux innombrables ouvriers américains, une université de papier, l’occasion d’accéder à la culture – et de la garder à portée de main, dans sa poche de pantalon.
Totalement convaincue par ce format court, humoristique mais incroyablement riche, je me suis fait un plaisir de découvrir l’histoire, certes tragique et irrésolue, de cet homme d’affaires éclairé. Son entreprise de petits livres bleus a permis a toute une classe sociale délaissée jusqu’alors d’accéder à des informations essentielles sur la contraception et le sexe, mais aussi à toute une culture réservée aux riches à l’époque (littérature, pensées politiques, économie, religion, etc). Grâce à un marketing agressif et ingénieux, consistant notamment à changer les titres des oeuvres littéraires pour les rendre plus accessibles aux masses, il réussit à essaimer ses petits livres bleus dans tous les foyers d’Amérique – il faut dire que Sacrifice d’une prostituée française, c’est plus vendeur que Boule de suif !
La très mirifique et déchirante histoire de l’homme qui inventa le livre de poche est une lecture très instructive, qui m’a beaucoup appris en seulement 57 pages et que je recommande vivement à tous ceux qui s’intéressent à l’histoire du livre !
Emanuel Haldeman-Julius se noie dans la piscine de son jardin le 31 juillet 1951. Accusé de communisme par la presse américaine, il a été mis sous surveillance par le FBI de J. Edgar Hoover. Compte tenu de l’atmosphère qui règne en ces temps de guerre froide, on soupçonne qu’Haldeman-Julius a été assassiné car il était un espion soviétique ; d’autres, tablent sur un suicide – quoique le seul mot qu’il eût laissé fût une mauvaise blague à l’attention de sa femme.
Une fin étrange pour un homme qui, en seulement trente ans, était devenu l’un des éditeurs les plus prolifiques de l’histoire des États-Unis, diffusant 300 millions d’exemplaires de ses « Petits livres bleus » aux lecteurs américains de la classe ouvrière, vendus au prix modique de 5 cents et conçus pour tenir dans une poche de pantalon.
Haldeman-Julius se distingua des précédents entrepreneurs par son talent de promoteur, sa volonté de s’adapter aux besoins du lectorat et son sentiment indéfectible d’être investi d’une mission. En 1924, il fit l’acquisition d’un nouveau modèle de presse à cylindre pouvant produire 40 000 livres en huit heures, ce qui lui permit de réduire une fois de plus le prix de l’exemplaire à 5 cents – en limitant les dimensions à 9cm par 13 pour cinquante ou soixante pages, brochées dans une couverture imprimée sur le papier cartonné le moins cher du marché (qui se trouvait être bleu).
Haldeman-Julius finit par se lasser de cette couleur et se diversifier, mais l’association demeura : les volumes de la collection naissante, surnommés « Petits Livres bleus », le restèrent jusqu’à la fin.
Plus d’informations et de citations sur Babelio.
Instructif et on lui dit merci 😉
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Instructif. Merci !
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Il est trop court pour que la PAL immense comme mon bras soit une excuse pour ne pas le lire ! Tant par curiosité que par intérêt pour l’histoire du livre, je le lirai !
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Ça me fait plaisir !
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