Ne crains pas l’ombre ni les chiens errants, Camille Zabka
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Publié le 16 février 2021

Dans l’épaisse nuit indonésienne, Cassandre fuit, sa fille serrée contre elle. Que fuit-elle ? Ou plutôt qui fuit-elle ? Petit à petit, à chaque étape de son voyage, elle raconte son histoire, ses envies d’ailleurs quand elle habitait à la campagne avec sa mère, ses rêves devenus réalité quand elle lie son destin au beau Lucas, leur emménagement à Magelang sur l’île de Java. Une vie idyllique pour beaucoup, dans laquelle elle se sent piégée, étrangère, menacée, et dont elle finit par s’extraire en rencontrant un homme, bien différent de ceux qui se pavanent dans les riches villas de sa gated community.
En Indonésie, Cassandre, ou plutôt Cassandra de son nom de baptême renoue avec son passé, avec la petite fille qu’elle a été avant d’arriver à Paris pour changer de vie. Redevenue la petite sauvageonne qu’elle était, elle explore l’île avec une curiosité avide, qui la distingue entièrement des autres buleh, ces blancs nantis qui agissent comme si tout leur était dû et qui se contentent de reproduire à l’autre bout de la Terre leur mode de vie occidental. Seule dans cette contrée lointaine, elle se questionne sur le destin qu’elle s’est choisi et sur l’homme avec lequel elle partage sa vie : est-ce vraiment ce dont elle rêvait enfant, quand elle voulait s’enfuir de son village natal ?
La plume de Camille Zabka est aussi suffocante que la moiteur indonésienne : elle instille dans l’ensemble du récit un sentiment de malaise, de danger latent qui encourage le lecteur à continuer sa lecture coûte que coûte, comme Cassandre poursuit sa fuite, quels que soient les obstacles rencontrés. Avec ses cours chapitres et ses phrases taillées à la serpe, c’est un livre qui tient en haleine jusqu’à la fin, imprimant dans notre rétine des paysages des jungles inhospitalières et le capharnaüm urbain des villes indonésiennes.
C’est un couple parfait d’expatriés français en Indonésie. Lui travaille dans l’exploitation de la palme, elle poursuit en indépendante son travail de rédactrice. Au début, les jours sont heureux sur cette île de Java aux paysages somptueux. Cassandra, issue d’un milieu modeste, aime quitter le complexe, où vivent derrière leurs hauts murs les Occidentaux, et découvrir seule les villages alentour. Mais bientôt le décor de rêve se fissure : la catastrophe écologique menace l’île, le petit groupe d’expatriés vit refermé sur son égoïsme. La naissance d’un bébé fragilise plus encore son équilibre, comme la rencontre avec un garde-forestier, Amu. Elle vient d’avoir trente ans, et, dit-elle, c’est un âge pour vivre ou pour mourir. Elle fait le choix de vivre : elle s’enfuit.
Dans ce deuxième roman, Camille Zabka déploie une écriture toute en sensations pour peindre aussi bien les paysages indonésiens que le portrait de son héroïne, une jeune femme instinctive, à la recherche de sa vérité.
Quand j’étais enfant, j’attendais avec impatience l’heure de me mettre au lit. C’était le moment des rêves d’aventure, avec Robin des Bois mon amoureux secret, des cachettes derrière les cascades, des maisons dans les arbres. Chaque soir, je construisais mes histoires minutieusement, et d’un jour à l’autre, je bâtissais des passerelles entre ces assemblages fragiles. Ils formaient bientôt tout un monde imaginaire, dans lequel je m’enfonçais avant de dormir.
Plus d’informations et de citations sur Babelio.
Merci pour cette chronique, je ne connaissais pas Camille Zabka.. Je trouve le thème de ce livre très attirant, je le note sur la PAL.
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