Paradis perdus Eric-Emmanuel Schmitt Editions Albin Michel, La Traversée des temps, The Unamed Bookshelf

Premier tome de la Traversée des temps, Paradis perdus raconte un moment-clé mais profondément obscur de l’histoire de l’humanité : le déluge. Insérant dans son récit une bonne dose de fiction, Eric-Emmanuel Schmitt suit le personnage de Noam, homme né à l’ère du néolithique qui se retrouve, par un étrange coup du sort, immortel. Alors que nous le rencontrons pour la première fois dans l’effervescente capitale libanaise d’aujourd’hui, perplexe devant les petites boites noires que tout le monde colle manipule à toute heure du jour et de la nuit, nous sommes ensuite entraînés dans son histoire, celle d’un fils de chef à l’heure où les hommes commencent tout juste à se rassembler en villages, à vivre de l’élevage et de l’agriculture, à se sédentariser. Fort de son immortalité, Noam raconte sa vie, tout en partageant ses réflexions sur l’évolution de l’humanité, sur notre rapport changeant à la terre et aux autres espèces animales, sur la culture, la religion, les rites et les mythes, et en illustrant certains points de petites anecdotes décalées sur les progrès qu’il a, bien malgré lui, apportés aux siècles suivants.

« Faire défiler les siècles, en embrasser les âges, en sentir les bouleversements, comme si Yuval Noah Harari avait croisé Alexandre Dumas » – sacré ambition pour un romancier ! Pour être honnête, j’étais certes curieuse de voir ce qu’avait écrit l’auteur, mais tout autant perplexe face à cette phrase d’accroche très marketing. Pourtant, en 564 pages, Eric-Emmanuel Schmitt m’a complètement réduite au silence – et j’admets volontiers avoir retrouvé dans ce livre ce que j’ai tant aimé dans les récits d’Harari et de Dumas. Dès les premières pages, je me suis laissée emportée par l’histoire, je me suis coulée dans la peau de Noam sans la moindre difficulté, j’ai épousé ses réflexions, ses frustrations, ses émotions. On y retrouve le côté aventureux des récits de cape et d’épée, le poids inexorable de l’histoire qui décide du destin de chacun d’entre nous, et l’analyse fine des évolutions que le monde a connues, accompagnées de réflexions philosophiques sur le bien et le mal, la justice des hommes, la droiture d’un chef.

On sent que l’auteur maîtrise son sujet, la quantité d’informations qu’il a compilées rejaillit dans le texte, nous donnant à la fois la sensation de vivre une aventure extraordinaire, et d’apprendre de nouvelles choses. On découvre la vie des premiers sédentaires, les habitudes de ces hommes proches de nous et pourtant très lointains, leurs croyances, leurs habitudes de vie, leurs problématiques du quotidien. Je me suis délectée des petites anecdotes en notes de bas de pages, qui nous font faire des bonds dans le temps et présentent avec une douce ironie les inventions à venir. C’est instructif tout en étant divertissant – tout ce que j’attends d’un roman digne de ce nom, et là, c’est très réussi. Vivement la suite !


Résumé de l’éditeur:

Cette Traversée des temps affronte un prodigieux  défi : raconter l’histoire de l’humanité sous la forme d’un roman. Faire défiler les siècles, en embrasser les âges, en sentir les bouleversements, comme si Yuval Noah Harari avait croisé Alexandre Dumas. Depuis plus de trente ans, ce projet titanesque occupe Eric-Emmanuel Schmitt. Accumulant connaissances scientifiques, médicales, religieuses, philosophiques, créant des personnages forts, touchants, vivants, il lui donne aujourd’hui naissance et nous propulse d’un monde à l’autre, de la préhistoire à nos jours, d’évolutions en révolutions, tandis que le passé éclaire le présent.
Paradis perdus lance cette aventure unique. Noam en est le héros. Né il y a 8000 ans dans un village lacustre, au cœur d’une nature paradisiaque, il a affronté les drames de son clan le jour où il a rencontré Noura, une femme imprévisible et fascinante, qui le révèle à lui-même. Il s’est mesuré à une calamité célèbre : le Déluge. Non seulement le Déluge fit entrer Noam-Noé dans l’Histoire mais il détermina son destin. Serait-il le seul à parcourir les époques ?


Ce constat, tout en me désemparant, dégageait une vérité ignorée : je possédais un certain pouvoir. Oui, je détenais le pouvoir d’intervenir dans ma vie au lieu de l’endurer ; du moins, je l’avais décelé. Je découvrais que je pouvais être moi, plutôt qu’un autre ; pour la première fois, je repérais une part indéterminée de mon existence, une faille, une zone de flou, une béance que je ne savais qualifier et que les philosophes appelleraient des millénaires plus tard, « la liberté ».

Plus d’informations et de citations sur Babelio.