Vies dérobées Cinzia Leone Editions Liana Levi Moyen-Orient Identité Famille The Unamed Bookshelf

Vous commencez à me connaître, et vous savez bien que je ne résiste jamais face à une belle fresque familiale et historique, à plus forte raison quand elle se déroule au Moyen-Orient et mêle aux faits historiques des questionnements religieux et identitaires. Bingo, c’est exactement le cas ici, avec Vies dérobées, un roman en trois parties de l’autrice italienne Cinzia Leone. Un homme, Turc musulman, choisit de s’approprier l’identité d’un autre, Juif d’Odessa, afin de récupérer les bénéfices d’une affaire commune suite à l’assassinat sauvage de ce dernier et de sa famille. C’est le début d’une imposture qui le suivra toute sa vie, jusqu’à peser sur le destin des générations suivantes.

A travers le destin des familles Ozäl, Azoulay et Cohen, ce sont des questions universelles et intemporelles que soulève l’autrice. Elle interroge l’identité de chacun, constituée de multiples ajouts et soustractions de l’Histoire, déterminée à l’aune d’une époque et d’une communauté que nous, ou nos ancêtres, ont choisi. Ici, religion musulmane, juive et chrétienne se font face, déchirant à l’intérieur ceux qui ont grandi dans des familles biconfessionnelles, décidant de facto de l’identité de ceux qui sont pleinement nés dans leur giron – ou qui semblent l’être. Il est fascinant de suivre dans le premier chapitre la transformation progressive d’Ibrahim Ozäl en Avraham Azoulay, et ses conséquences pour sa famille, puis de découvrir, après une escapade aux côtés de Guiditta, les errements des générations suivantes, dont l’identité s’est délité au fur et à mesure de l’érosion des communautés religieuses.

A part quelques longueurs dans le récit, ce livre est une épopée à travers le XXème siècle, entre les différentes rives de la Méditerranée, au cœur de familles différentes et pourtant si similaires. J’ai été très émue par les personnages, dont les questionnements identitaires et religieux sont très largement explorés par l’autrice. C’est un voyage qui ne m’aura pas laissée indifférente !


Résumé de l’éditeur:

Notre identité est-elle soluble dans un lot de coton égyptien? À Jaffa, lorsque Avraham est tué dans le massacre des Juifs de la ville en 1936, son associé musulman, Ibrahim, décide en quelques heures de se faire passer pour lui afin de récupérer le précieux tissu. Il ne mesure pas alors le poids que cette tromperie aura sur sa femme Miriam. Mais aussi sur leur fille et les générations suivantes. D’Istanbul à Djerba, de Bâle à Miami, d’Ancône à Rome, l’imbroglio identitaire se fera de plus en plus inextricable. Et ce seront Giuditta et Esther qui, de façon détournée, payeront leur tribut à ces vies dérobées. Et vous, êtes-vous sûr de vos origines?


Quand le steamer entra dans la rade, fendant les fumerolles qui s’élevaient du canal Mahmoudia, les courbes rosées d’Alexandrie lui apparurent, telle la silhouette floue d’un corps émergeant des vapeurs d’un hammam. Etendue en bord de mer, assiégée par le sable, immémoriale mais déjà prête à embrasser la modernité, cette ville saurait apaiser ses angoisses et satisfaire tous ses désirs. Si Djerba avait été la nourrice qui l’avait abreuvé au lait du judaïsme, Alexandrie serait la putain cosmopolite qui comblerait toutes ses attentes.

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