Ce qu'il nous faut de remords et d'espérance, Céline Lapertot, The Unamed Bookshelf, Rentrée littéraire 2021

Roger Leroy, Nicolas Lempereur : deux frères que tout oppose, uniquement liés par un sentiment de haine viscéral qui aura déterminé toute leur vie. Le premier est garde des Sceaux, en passe de rétablir la peine de mort, le second est rock-star, en passe de perdre sa tête sur l’échafaud. Querelle intime que celle de ces deux frères, qui devient débat public, illustration d’une société devenue dysfonctionnelle où la peur a poussé les gens à vouloir passer par les armes quiconque pourrait représenter un danger – et au diable la présomption d’innocence, plus de retour possible en cas d’erreur.

Comme De sang-froid de Truman Capote, Ce qu’il nous faut de remords et d’espérance interroge le droit de l’Etat à s’arroger le pouvoir de vie ou de mort sur ses citoyens. Prenant un prisme différent, Céline Lapertot nous montre la part d’intime qui influe immanquablement sur notre opinion de la peine de mort. Comme Roger Leroy, nous ne pouvons pas avoir une opinion objective, politique et désintéressée : si nous en arrivons à souhaiter le rétablissement de la peine de mort, c’est probablement parce que nous avons souffert, que nous voulons faire payer quelqu’un pour ses actions vis-à-vis de nous-mêmes ou de nos proches. La question de la peine de mort révèle nos instincts les plus inavouables, les plus égocentrés et les plus intolérants – tout ce qu’il faut absolument bannir quand il s’agit de décider objectivement de la possibilité pour un homme de garder sa tête.

Céline Lapertot nous met en apnée pendant deux cent pages, dansant habilement sur le fil ténu qui sépare les innocents et les coupables, le bien et le mal. Fine psychologue, elle s’insère avec brio dans la tête de chacun de ses personnages, jusqu’au pédophile Lalbenc, qui se pare à nos yeux d’une humanité inopinée. S’attaquant une fois de plus à un sujet tabou et dérangeant, Céline Lapertot parvient une fois de plus à nous faire réfléchir, nous destabiliser et nous retourner les tripes, tout en finesse. Une autrice de génie, c’est le moins qu’on puisse dire.


Résumé de l’éditeur:

À 10 ans, Roger Leroy vit comme une trahison l’arrivée dans sa vie de son demi-frère, Nicolas Lempereur. C’est le début d’une haine que rien ni personne ne saura apaiser.

Bien des années plus tard, Roger, garde des Sceaux d’un gouvernement populiste, œuvre à la réhabilitation de la peine de mort. Nicolas, lui, est une véritable rock star, pacifiste et contre toute forme de discrimination. Un fait divers impliquant un pédophile récidiviste rallie bientôt l’opinion publique à la cause du garde des Sceaux, et la peine de mort est rétablie. Mais quand Nicolas est accusé du meurtre d’une jeune femme et clame son innocence, la querelle fraternelle qui l’oppose à Roger devient alors un enjeu sociétal et moral. Ce qu’il nous faut de remords et d’espérance est la chronique annoncée d’une tragédie contemporaine ; un roman coup de poing, criant de vérité.


Les doigts touchent, effleurent, explorent une dernière fois, la douceur de l’oreiller, le lissé d’une feuille de papier, la rugosité d’une mine de crayon, la fraîcheur de l’eau qui coule entre les phalanges, celle, plus fraîche encore, qui trouve son chemin à l’intérieur de la gorge, la chaleur au creux de la nuque quand on y passe la main pour caresser la racine des cheveux. Cette douce chaleur dans ce creux de la nuque, oui, celle-là même qui disparaîtra quand le couperet tombera. La caresser encore, cette nuque, encore et encore, jusqu’à rendre la pulpe de ses doigts grasse, boire toujours plus jusqu’à s’en faire éclater la vessie, pour se prouver encore un peu que quelque chose coule en nous. Ce petit quelque chose qu’on appelle le désir de vivre.

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