
Ce qui me vient à l’esprit après avoir refermé ce livre, c’est avant tout beaucoup de gratitude pour son autrice, Titiou Lecoq, pour l’éclairage nouveau qu’elle vient de m’apporter sur notre société, ses fondements idéologiques et ses aberrations multiples. Comme elle, je ne me suis jamais tellement interrogée sur l’absence des femmes dans l’Histoire – difficile de voir les absentes quand les présents prennent tellement de place. Pour autant, j’ai bien conscience d’avoir intériorisé un certain nombre de préconceptions qui ne sont pas totalement en accord avec ce que je suis et la définition que j’ai de mon propre genre – mais difficile de mettre le doigt sur le problème quand toute la société s’entend à garder les femmes « à leur place ». Quel bonheur donc, de découvrir dans cet essai écrit avec verve que cette image de la femme qu’on m’impose depuis toujours n’est qu’une construction masculine datant du XIXème siècle !
Dans ce livre, Titiou Lecoq mêle habilement destins de femmes, réflexions sociétales et faits historiques pour nous montrer que, oui, les femmes ont joué un rôle primordial dans l’Histoire à de nombreuses occasions, que certaines d’entre elles ont été tout aussi (voire même plus !) héroïques et admirables que les hommes et que leur disparition du récit officiel n’est qu’une suite de décisions politiques prises par les hommes pour s’assurer de garder les femmes dans l’ombre. Il est fascinant de voir comment, en quelques centaines d’années, l’imaginaire construit autour des femmes est passé d’un extrême à l’autre, alors même que leurs droits disparaissent progressivement, avant que les luttes féministes ne parviennent, après des années de combats acharnés, à les restaurer.
Forcément, ce livre pose la question de la situation actuelle, et du chemin qui nous reste encore à parcourir, collectivement, pour aboutir à une société plus égalitaire. Nous sommes encore bien loin de l’idéal que défend Titiou Lecoq, notamment parce que les récits actuels n’ont toujours pas éradiqué les préconceptions stupides construites au fil des ans. Espérons que cet ouvrage participe à changer l’Histoire que nous raconterons aux générations futures !
« On nous a appris que l’histoire avait un sens et que, concernant les femmes, elle allait d’un état de servitude totale vers une libération complète, comme si la marche vers l’égalité était un processus naturel. Ce n’est pas exact. On a travesti les faits. On a effacé celles qui avaient agi, celles qui, dans le passé, avaient gouverné, parlé, dirigé, créé.»
A la préhistoire, les femmes chassaient, au Moyen Âge, elles étaient bâtisseuses de cathédrales ou encore espionnes durant la guerre de Cent Ans ; au XIXe siècle, elles furent journalistes… À chaque époque, elles ont agi, dirigé, créé, gouverné mais une grande partie d’entre elles n’apparaissent pas dans les manuels d’histoire. Dans la lignée des travaux de Michelle Perrot, Titiou Lecoq passe au crible les découvertes les plus récentes. Elle analyse, décortique les mécanismes, s’insurge, s’arrête sur des vies oubliées pour les mettre en lumière. Sa patte mordante donne à cette lecture tout son sel. Les femmes ne se sont jamais tues. Ce livre leur redonne leur voix.
Pourquoi a-t-on l’impression qu’introduire les femmes en histoire serait une décision politique alors que c’est les avoir exclues qui était réellement politique ? Un travail d’homme qui reconduit la domination masculine passe rarement pour militant et ne s’affirme quasi jamais comme tel. Le discours dominant et officiel parait neutre. Il ne l’est pas. Mais il parvient, par sa position majoritaire, à faire reconnaître ses choix pour de l’objectivité.
Pourtant, on peut se demander comment le fait d’exclure la moitié de la population française des livres d’histoire peut être une preuve d’objectivité. N’est-ce pas l’inverse ?
Plus d’informations et de citations sur Babelio.
il est dans ma PAL je le lirai sûrement, car le sujet est on ne peut plus actuel les critiques sont très bonnes 🙂
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Il est vraiment passionnant, je ne doute pas qu’il te plaira !
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J’avais aimé sa plume dans « Honoré et moi » et l’importance du sujet traité mérite que je m’intéresse à son nouveau livre.
Est-ce bien une construction masculine ? La formule tend à accuser tous les hommes. La classe dirigeante libérale et capitaliste a depuis deux siècles oublié, pour dire l’histoire, les femmes et pas mal de minorités et d’opposants, classe dirigeante dans laquelle on trouve, c’est vrai, beaucoup d’hommes.
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Ce livre me tente beaucoup et davantage encore en lisant ta chronique 🙂
Bonne journée !
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J’en suis ravie !
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Un essai facile et dynamique qui nous fait nous interroger sur notre passé et sur notre future façon de faire apprendre l’histoire…
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On est d’accord !
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