
Il est absolument fascinant de voir un auteur américain reprendre à son compte, avec autant de brio, les codes du roman japonais traditionnel. Questions d’honneur, place prépondérante de la nature, rôle-clé du détachement de soi incarné dans le bouddhisme et la discipline samouraï, charme discret des haïkus, tout se retrouve ici pour former un envoûtant huis-clos dans lequel quelques personnages se débattent dans la blancheur cotonneuse de la neige. Matari fuit son seigneur de mari qui veut la tuer pour laver son honneur, Oboko et Izzi, poètes, se retrouvent à l’assister dans sa fuite, prenant malgré eux ledit mari en otage. Absurde mais sensible et d’une grande beauté, ce récit émeut, de bout en bout.
Je n’ai jamais lu cet auteur auparavant, seule la quatrième de couverture et le gage d’une découverte littéraire soigneusement choisie par les Forges de Vulcain m’a convaincue de me plonger dans cette histoire. Et je dois dire que j’ai pas été déçue. Grande amatrice du Clan des Otori, j’ai retrouvé ici cette ambiance si particulière au Japon ancestral, ce côté philosophique qui apparaît au détour de chaque page alors que les personnages tentent de trouver un sens à ce qui leur arrive. Ici, les tiraillements de l’âme constituent le centre de ce récit d’une douce lenteur, charge de suspense et de tension romanesque. Un vrai page-turner en somme, alors qu’il s’y passe finalement bien peu de choses : la marque d’un vrai bon roman.
Résumé de l’éditeur:
Matari, qui s’était enfoncée dans la nuit neigeuse dans l’espoir d’y mourir, est sauvée et recueillie par Oboko, un poète et moine bouddhiste. Honneur, poésie, philosophie, amour s’affrontent dans ce huis clos, où Luke Rhinehart, en rendant hommage aux sept samouraïs du cinéaste japonais Akira Kurosawa, parvient, comme dans nul autre roman dans son oeuvre, à exprimer la nécessité existentielle du détachement de soi comme seule voie dans un monde où tout est vain et destiné à mourir, pour connaître la joie, l’amitié et l’amour.
– Matari a peut-être cessé d’être Matari, mais Arishi ne cesse pas d’être Arishi pour autant. Tant qu’elle vit, l’honneur et les serments n’ont plus aucun sens. Les fondations sur lesquelles mon univers repose tombent et s’écroulent. Je ne la tuerai pas parce qu’elle n’a pas d’importance pour moi (…) mais parce que si je ne la tue pas, cela signifiera que le seigneur Arishi est mort et indifférent. Matari est la pomme d’or du soleil, et si on ne la cueille pas aussitôt, elle pourrira et dégagera la pire puanteur de viscères empoisonnées qu’homme ait jamais humée.
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