En retard pour la guerre, Valérie Zenatti, Editions de l'Olivier, The Unamed Bookshelf

Les négociations sont en cours, et à Jérusalem, on attend la fin du monde. Les directives pour se protéger semblent absurdes, on ne sait pas si on va se réveiller le lendemain matin dans un monde sans dessus-dessous ou si la vie va continuer comme avant pour encore longtemps. Contexte différent mais dont l’absurdité n’est pas sans rappeler celle que nous avons vécu dernièrement sous le joug de cette pandémie qui n’en finit pas. Au milieu de ce bordel ambiant, Constance Kahn, étudiante, rédige un mémoire sur Flavius Josèphe, l’auteur de La Guerre des Juifs, témoins de la prise de Jérusalem par les Romains. Engluée dans un quotidien sans issue, elle se plonge dans l’histoire antique pour oublier l’échec de sa propre vie, sa relation malsaine avec Nathanaël, ses traumatisants souvenirs d’enfance.

Sur un ton à la fois tragicomique et loufoque, Valérie Zenatti nous raconte l’absurdité de la guerre moderne, surtout dans cette partie du monde où aucune guerre ne semble pouvoir éclater sans qu’Israël n’en essuie les plâtres. Ici tout le monde attend que la guerre commence, personne ne sait vraiment comment s’y préparer, c’est simplement le ciel qui va leur tomber sur la tête d’un moment à l’autre, et charge à eux de savoir mettre leur masque à gaz et barricader leur salle de bains. L’imminence de la guerre amène Constance à réfléchir à sa vie, à ses choix, à ses problèmes, jusqu’à l’encourager à prendre des décisions drastiques et nécessaires, au pire moment possible – en pleine guerre du Golfe. Mais y a-t-il un bon moment pour choisir enfin sa vie et se libérer de ses entraves ?

En retard pour la guerre nous maintient en apnée de page en page, dans un état dérangeant d’attente incompréhensible, avec la vie qui continue alors que tout ce qui constitue le quotidien va peut-être bientôt disparaître sous les bombes. C’est un sentiment qui nous est aujourd’hui très familier et qui, pour moi, a beaucoup résonné même si le contexte décrit par Valérie Zenatti n’a rien à voir avec celui que nous connaissons aujourd’hui. Face à l’urgence climatique, nous sommes nous aussi en retard pour la guerre, attendant simplement qu’elle nous tombe dessus, insidieusement, comme elle a commencé à le faire…


Résumé de l’éditeur :

Janvier 1991. Tous les yeux sont tournés vers l’Irak. Saddam Hussein cédera-t-il à l’ultimatum lancé par l’ONU après l’invasion du Koweït ? Mettra-t-il sa menace à exécution en usant d’armes chimiques et bactériologiques ?

Pour la jeunesse de Jérusalem, l’ambiance est aux fêtes de fin du monde. Constance Kahn, étudiante en histoire antique, se pose des questions aussi pragmatiques qu’existentielles : comment faire confiance à du scotch, une serpillière mouillée et un masque à gaz pour se défendre ? Comment peut-on fixer un rendez-vous avec la guerre ?

Mais le plus grand danger n’est peut-être pas celui qui fait la une des journaux. Car dans l’absurdité tragi-comique de ces semaines, et dans le huis clos imposé par un couvre-feu, c’est un autre combat qui se joue.


Je vois le sable du désert d’Arabie s’écouler dans un sablier géant. On ne peut pas se contenter de continuer au même rythme, comme si de rien n’était. On ne peut pas simplement sentir une boule d’angoisse et d’incertitude, continuer à se disputer à intervalles de plus en plus réguliers, osciller entre l’amour, la violence et les dettes à payer. il faudrait prendre la vie à bras-le-corps. Voilà des mots solides et déterminés. Si je parviens à les suivre, ils devraient me guider. Mais cette expression recouvre des gestes qui m’échappent, elle appartient à d’autres, jamais à court d’énergie, à ceux qui se sont débrouillés pour que la solitude ne soit rien que de purs moments de bonheur choisi, ceux qui savent organiser des fêtes de fin du monde. J’ai le sentiment de perdre pied, de ne trouver en moi aucun mot, aucun désir, incapable de donner des contours et une couleur aux jours prochains.

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