
Aurélien, alias Harry avec ses petites lunettes rondes et ses cheveux noirs, vivote tranquillement à Poitiers où il cumule deux boulots, au McDo du coin et à l’agence de pompes funèbres. Deux mondes diamétralement opposés que son humour grinçant n’a de cesse de rapprocher, histoire de rire un peu de cette situation grotesque dans laquelle, semble-t-il, il se retrouve un peu malgré lui. Alternant passé et présent, il nous raconte sa vie, ses petites histoires de collèges, sa bande de copains et leurs conneries, son amour adolescent pour Sonia, affreusement maladroit mais touchant. Ce sont des tranches de vie accolées, qui petit à petit révèlent la complexité du personnage principal, dont on se doute qu’il est un petit peu inspiré de l’auteur lui-même.
Avec un humour décalé, des moments surprenants et des chapitres au pas de course, Pierre Guénard nous dépeint la vie normale d’un garçon normal dans une ville normale, une vie française version XXIème siècle. Il essaie de rire de tout et parfois on sent que ce rire lui reste en travers de la gorge mais qu’il continue à essayer de faire bonne figure, à croire en ses rêves et à rechercher l’amour. A sa manière, il questionne le modèle de réussite communément admis dans notre société, cet idéal dont se détachent de plus en plus de jeunes, cette vision de l’âge adulte comme l’âge de raison. Cesse-t-on jamais vraiment d’être un petit garnement qui fait des conneries avec ses copains ?
C’est un style franc, direct, sans concessions, on le dirait parlé, avec ses phrases rapides, ses changements brusques, ses chutes assenées. On n’a pas le temps de s’ennuyer avec cette centaine de pages et quelques, mais on regrette un peu qu’il n’ait pas poussé l’introspection un peu plus loin. Je vois ce livre un peu comme une étoile filante, intense quand elle est là, mais passée finalement trop rapidement pour bien la voir.
Tout le monde l’appelle Harry mais c’est Aurélien Moreau. En attendant la gloire, Aurélien travaille la nuit chez McDo et le jour aux pompes funèbres. Quand il s’échappe de son quotidien, c’est pour repenser à l’enfant qu’il était dans le petit bourg qui l’a vu grandir, le genre d’endroit où, pour tuer le temps, il faut vivre ses premières fois, frôler le danger et se défoncer. Que deviennent nos rêves dans un monde où tout semble figé ?
Zéro gloire, premier roman au style incisif, met en scène cette jeunesse désenchantée tenue de rêver très grand pour s’évader. Pierre Guénard réussit le tour de force de trouver de la poésie dans le tragique ordinaire et de la beauté même quand il y a peu d’espoir.
Selon l’uniforme que je porte, je vends des burgers ou je viens chercher un corps, alors je me dis qu’on devrait inventer le Big Macchabée juste pour moi.
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