Tout commence sur un cliché : une femme, d’origine étrangère, qui se contente d’un boulot en dessous de ses capacités, et d’un couple insatisfaisant avec le fils d’un ministre. Ça aurait pu continuer longtemps comme ça pour Nour, les sourires factices et les journées sans but, si elle n’avait pas accidentellement renversé une femme un jour en allant au cimetière. Si Constance n’avait pas subitement expiré sous ses roues alors qu’elle allait fleurir la tombe de son père. Comment se remet-on d’un accident pareil ? Peut-on continuer à vivre après avoir accidentellement ôté la vie à quelqu’un ? La société de nous condamne pas, d’autant plus si l’autre personne est en tort, et pour autant, est-ce bien normal de continuer à respirer après avoir entendu les os craquer sous ses roues ?

Odile d’Oultremont aurait pu s’en arrêter là pour traiter ce sujet difficile, mais non, ça ne suffit pas, elle ajoute un père bandit, retenu en prison depuis vingt-cinq ans après avoir tué cinq personnes dans une fusillade. Un détenu, tellement habitué à la prison qu’il n’ose plus en sortir, et encore moins quand sa seule raison de mettre le nez dehors finit sa vie sous la voiture de Nour. L’un dans l’autre, nous avons donc un roman complexe malgré un début finalement assez simpliste, où chacun tente de sortir sa tête hors des eaux troubles qui l’enserrent, où Nour comme Yarol se débattent avec leurs démons, leurs vies inachevées, leurs peurs enfouies.

A travers ce récit, l’autrice amène un peu d’humanité dans le milieu carcéral et nous encourage à nous questionner sur ces gens qu’on enferme dans un espoir de rédemption et de changement : sommes-nous prêts à les considérer comme des êtres humains à part entière, le jour où ils sortiront ? Accepterons-nous qu’ils souffrent en perdant un être cher ou continuerons-nous à leur rappelé qu’ils en ont pris, eux aussi, des êtres chers ? Est-ce vraiment la rédemption qui les attend au bout de leur peine ? Une réinsertion est-elle possible pour un homme qui a pris vingt-cinq ans suite à de mauvais choix ? Vous l’aurez compris, Odile d’Oultremont m’a une fois de plus retournée.


Résumé de l’éditeur:

« C’est ahurissant à quel point une phrase, une seule, constituée des mêmes mots, en tous points pareils, a suffi à rendre à Nour son monde entier et à faire éclore en Ponthus les prémices d’une vérité dont aucun parent ne voudrait. »
Chacun à sa manière, Nour Delsaux et Yarol Ponthus sous-vivent. L’une est enfermée dans une existence où elle se satisfait de petits arrangements avec elle-même, l’autre est écroué depuis un quart de siècle dans une cellule de huit mètres carrés.
En février 2020, dans d’étranges circonstances, la trajectoire de l’un percute celle de l’autre.


Des contours brumeux plus que des traits distincts, une silhouette, peut-être une voix, une façon de se mouvoir, un éclat de rire, se précisent ensuite des cheveux vaporeux qui, le plus souvent, balaient une nuque. Des mains minuscules, de petites chaussures marron, une odeur de savon tiède – quelque chose comme du réglisse-, le velouté d’une peau si fine, transparente par endroits. Il entrevoit des yeux clairs et une main qui lui tend une feuille, avec une fierté portée par des mots encore en jachère. Lui revient aussi l’esquisse d’un premier dessin puis son émotion, celle d’un jeune père qui porte son enfant jusqu’à son visage comme on soulève un trophée, qui l’embrasse et, plonge dans son cou, l’inspire toute entière, elle et tous ses parfums d’un souffle nouveau.

Plus d’informations et de citations sur Babelio.