Celui qui disait non - Adeline Baldacchino - Fayard - Roman - 68 premières fois

📖68 Premières Fois – Hiver 2018

13 juin 1936. August Landmesser, aryen amoureux d’une Juive, refuse de saluer Hitler sur le quai de Blohm + Voss, à Hambourg. Premier signe d’insoumission, annonciateur du terrible destin de ce couple impossible. Le Reich n’autorise pas les aryens à s’accoupler avec des Juives, et encore moins à les aimer. Pris sur le fait, August sera condamné deux fois, incapable qu’il est de se retenir d’aller voir Irma, d’aller embrasser ses filles, Ingrid et Irene. Suite aux mesures mises en place par Heydrich, Irma sera emprisonnée « pour sa protection », avant d’être emmenée à Bernburg, premier centre d’extermination entièrement dédié à la solution finale. Jusqu’au bout, ils s’aimèrent, malgré la peur, malgré les interdits, malgré la mort.

Landmesser n’avait pas peur en 1936. Il sait huit ans plus tard que la peur est éternelle, que le courage est éphémère, que c’est une étincelle qui s’échappe des grands vivants, mais qu’elle ne dure pas. Le referait-il ?

Destin tragique que celui de ce couple d’amoureux, empêchés de s’aimer, de se marier, de vivre même à cause des lois anti-juives du régime nazi. Il ne reste de leurs vies que quelques morceaux de papier, et cette photographie en noir et blanc, cette foule au bras levé où un seul homme garde les bras croisés. Superbe reconstitution que celle d’Adeline Baldacchino, faite de suppositions et de devinettes, où la réalité des faits historiques rencontre l’intangible des sentiments et du ressenti des hommes, des femmes et des enfants qui ont fait l’Histoire. Nul ne saura jamais si c’est bien comme ça que ce sont passé les choses, mais beaucoup pourront y croire, c’est bien là le plus important.

Qu’avaient-ils fait de leurs vies, ces deux-là qui s’aimaient? C’est toujours par une question simple que commencent les quêtes les plus tourmentées. Qu’avaient-ils fait de leurs corps, de leur amour, de leur extases et de leur colère?

Un roman comme une longue litanie à l’amour impossible, un style poétique pour ancrer dans nos têtes les horreurs du nazisme, la beauté du sentiment amoureux, l’acharnement de ceux qui se savent condamnés. 258 pages pour opposer l’oppression à l’amour véritable, pour éprouver la résistance du lecteur face à tant de haine et de violence, vis-à-vis de tous ces innocents qui n’avaient commis qu’un seul crime, celui d’exister. C’est un livre difficile que celui-ci, un livre fort et poignant, où les répétitions constantes ne font que renforcer notre sentiment d’injustice.

Un livre qui m’a marqué, même s’il est difficile de dire si j’ai « aimé ».


Résumé de l’éditeur :

Quand August et Irma comprennent que la politique rattrape toujours ceux qui s’en défendent, il est déjà trop tard pour survivre, mais encore temps de mourir libres.
Le 13 juin 1936, un homme perdu dans la foule, sur le quai d’un chantier naval de Hambourg, refuse de saluer Hitler. Le 28 avril 1942, une femme fait partie du premier convoi des gazées de Ravensbrück. Ou comment une histoire d’amour devient une histoire d’insoumission.
Ce roman est leur tombeau, dédié aux vivants qui voudraient se souvenir de l’avenir.


J’écris pour retenir, et n’ai jamais fait que cela. J’écris pour devenir, et n’ai jamais tenté que cela. Que se passe-t-il, quand on raconte l’histoire d’un homme pour y abriter, en creux, celle d’un autre?
C’est une drôle d’alchimie que celle de la douleur et de la mémoire, quand la littérature s’en mêle. Il faut accepter de passer un pacte avec le petit dieu des métamorphoses : il me murmure qu’à défaut de parler de toi, papa, je te parlerai de lui, August.

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