Faune et flore du dedans Blandine Fauré Arléa Editeur Rentrée littéraire 2018 68 premières fois The Unamed Bookshelf📖68 Premières Fois – Automne 2018

Lorsqu’elle passe la porte du bureau de Joachim, Louise cherche seulement à noyer ses démons dans un trop-plein de connaissances, dans l’étude infinie de la nature pour servir ses projets artistiques. Pourtant, cette première rencontre d’apparence anodine va l’entraîner à l’autre bout du monde, au coeur de la forêt amazonienne, impitoyable de densité. Le contact avec cette nature puissante et indomptable suffira-t-il à Louise pour tourner la page sur ses souffrances passées ? Cette expédition sera-t-elle le point de départ d’une nouvelle vie ?

Blandine Fauré nous offre un roman poétique, d’une très grande sensibilité, où l’élément naturel se présente comme une puissance dépassant l’homme, un exutoire à la fois rassurant et menaçant où se réfugier en cas de détresse. Dès le début, le cadre est posé, celui du lexique de botanique, riche de définitions diverses, applicables aux plantes, mais aussi à nos personnages. Louise apparaît d’abord fantasque, sûre d’elle et insolente, avant de laisser entrevoir, lors des moments clés de l’expédition, des fêlures liées à son passé, à sa famille et à son ancien amant, Igor. Le voyage prend dès lors un tour initiatique : plus qu’un projet artistique, c’est sa vie qu’elle vient réinventer ici, auprès du ténébreux scientifique aux petits carnets noirs.

Roman à deux voix, où l’épistolaire se superpose à la prose omnisciente du narrateur, Faune et flore du dedans nous transporte dans un autre monde, inconnu et fascinant, celui de la forêt amazonienne, théâtre d’une histoire impossible, d’un désir secret et inassouvi. Rien de se passe comme nous l’aurions imaginé dès les premières pages, mais on sort de cette lecture profondément touchés par le parcours tumultueux de nos personnages.


Résumé de l’éditeur :

La forêt me dévore, me happe, désagrège toutes mes défenses. Elle m’assomme par sa densité, les milliers d’arbres alignés devant moi s’empressent de me voler quelque chose que je ne veux pas leur donner.

Que fait Louise, artiste plasticienne, un peu photographe, un peu dessinatrice, dans cette équipe de scientifiques dont la mission est d’explorer le parc El Manu, jungle amazonienne péruvienne et d’y collecter des espèces inconnues, menacées quelquefois, dans des conditions extrêmes. Pourquoi les a-t-elle rejoints et que vient-elle chercher ? Il y a bien sûr un travail artistique sur le végétal qu’elle veut mener à bien, mais très vite d’autres raisons, plus obscures, se dessinent. Il y a Joachim, le chef de l’expédition, avec lequel se noue une relation intense, secrète et toute en retenue. Il y a le passé, douloureux, émaillé de deuils, d’absence et d’abandons. Il y a aussi la quête, trouver enfin une forme d’apaisement, de réconciliation avec soi-même, avec la vie tout court.
La forêt, la selva, se déploie tout au long du livre. Elle est inquiétante, protectrice, matricielle, elle engloutit autant qu’elle rejette, elle met à nu et peut tuer aussi. Elle envoûte ceux qui la pénètrent et tentent de se mesurer à elle. Louise marche, respire, se fond dans cet océan vert et nous marchons avec elle, nous respirons, nous cheminons derrière elle. Comme elle, nous observons le lent et puissant assaut des plantes vers la lumière, le combat pour la survie, la tentation de la disparition.

Blandine Fauré, avec ce premier roman d’une exceptionnelle maîtrise, nous embarque dans une aventure intérieure, long chemin vers la rédemption, et dans une aventure unique, digne des grands récits initiatiques, où se mêle la découverte toujours juste d’un biotope inconnu, menacé, et clos sur lui-même.


Ici, le silence est empli de cris, de bourdonnements lointains, comme une basse continue face à l’éternité. Hululements, caquètements, échos indiscernables, un orchestre désordonné et entêtant défait nos mélodies urbaines. Plus rien ne reste de nos chansons intérieures, tout es pulvérisé par le bruissement intraitable de la forêt. On s’habitue. On finit par l’oublier, ce chant, on fait avec. Et on oublie le monde d’avant ; les portiques enfumés de goudron chaud, les terrasses bruyantes, disparaissent de nos mémoires. Mon mental se plie au labyrinthe végétal, il s’adapte, souple, aux contraintes du chemin, se modèle aux enchevêtrements et aux dédales de la vie primaire.

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