L'été des oranges amères Claire Fuller Editions Stock 2020 The Unamed BookshelfDans son dernier roman, Claire Fuller explore les dynamiques intrinsèques d’un couple, Peter et Cara, dont le fonctionnement atypique est fragilisé par l’irruption dans leur vie de la narratrice, Fran, une femme plus toute jeune, un peu inadaptée socialement. Se retrouvant par hasard à partager une vieille demeure décatie de la campagne anglaise, ils se laissent aller à une amitié ambiguë, faite de secrets et de mensonges, de soirées arrosées et de délires extravagants, jusqu’à ce que cette relation triangulaire malsaine finisse par avoir raison d’eux.

Après avoir apprécié Un mariage anglais, j’étais impatiente à l’idée de replonger dans le style de cette auteure, cette indolence pesante qu’elle installe pour mieux ferrer ses personnages, le plus souvent dans un cadre où la nature est très présente et inhospitalière. Malheureusement, si j’ai apprécié les descriptions de Lyntons, de la campagne anglaise et des journées alanguies au bord du lac qui créent une ambiance très lascive, je n’ai pas été totalement captivée par le récit.

Dès le début, l’auteur essaie d’instaurer un certain suspense avec un jeu de flashbacks, où Fran, devenue vieille, se remémore l’été à Lyntons à la demande du vicaire, Victor. Pour autant, cette alternance passé/présent manque de réalisme, utilisant trop souvent l’omission pour garder un semblant de mystère, empêchant le lecteur de formuler ses propres hypothèses. De même, l’auteur cherche à jouer sur la dichotomie entre fiction et réalité, ce qu’on ne comprend qu’à la fin et qui aurait mérité d’être suggéré plus tôt dans le récit, pour renforcer la tension dramatique et l’inexorabilité du dénouement. Ça manque de suggestions, de petits indices qui viennent titiller le lecteur et piquer son intérêt à intervalles réguliers. Une bonne lecture d’été à lire lentement sur un transat, mais guère plus à mon sens.


Résumé de l’éditeur:

À 39 ans, Frances Jellico s’apprête à vivre son premier été de liberté. Enfin délivrée de son tyran de mère, Frances a été missionnée pour faire l’état des lieux du domaine de Lyntons. Jadis somptueuse propriété au cœur de la campagne anglaise, Lyntons est désormais un manoir délabré qui peine à se relever des années de guerre.
Dès son arrivée, Frances réalise qu’elle n’est pas la seule occupante des lieux : Peter et Cara, un couple aussi séduisant que mystérieux, sont déjà installés. Lorsqu’elle découvre un judas dans le plancher de sa chambre – qui lui offre une vue plongeante sur leur salle de bains – sa fascination pour eux ne connaît plus de limites.
Ses voisins se montrent très amicaux, et plus les jours passent, plus Frances se rapproche d’eux. À mesure que l’été se consume, que les bouteilles de vin se vident et que les cendres de cigarettes se répandent sur le vieux mobilier, Frances commence à entrevoir le passé tourmenté de Cara et Peter. La vérité laisse place au mensonge, les langues se délient, les souvenirs ressurgissent, au risque de faire basculer cet été 1969.


C’était nouveau et choquant, en 1969, cette manière de prendre les gens dans ses bras qu’avait Cara. Je sais qu’aujourd’hui les gens font ça tout le temps ; je les vois faire ici parfois, quand une fille vient prendre son service et que l’autre s’en va. Des femmes qui s’enlacent, des femmes qui enlacent des hommes, des hommes qui enlacent des femmes : je me demande comment ils arrivent à anticiper le geste. Quel mouvement imperceptible, quel élément de langage corporel que j’ai toujours manqué, le leur indique, les prévient qu’ils sont sur le point de se prendre dans les bras ? Est-ce que les hommes enlacent les hommes aussi ? Ici, je n’ai personne à enlacer, et personne ne vient m’enlacer.

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