La légende des filles rouges Kazuki Sakuraba Editions Folio Poche The Unamed Bookshelf 2021 Japon Histoire Famille Héritage

Chez les Akakuchiba, ce sont les femmes qui développent, maintiennent et transmettent l’héritage familial. Quand la Grande Dame Tatsu choisit la petite Man’yô, orpheline élevée par des ouvriers, pour épouser son fils unique, personne n’ose s’interposer. Dotée de dons de voyance, Man’yô sauvera plus d’une fois l’entreprise familiale de la faillite, tout en élevant quatre enfants aux noms farfelus et aux caractères bien tranchés, et une petite fille, Tôko, qui retranscrira leur histoire à tous. Saga familiale de grande envergure, La légende des filles rouges retrace plus de cinquante ans de l’histoire du Japon, de la relance économique post-Seconde Guerre Mondiale jusqu’aux désillusions de l’époque contemporaine.

A travers l’histoire des Akakuchiba, c’est toute la société japonaise du XXème siècle qui est décortiquée sous la plume de Kazuki Sakuraba. En adoptant les points de vue successifs de Man’yô, Kemari puis Tôko, elle raconte le Japon de l’intérieur, celui des villages de province, attachés aux traditions, écrasés par la modernisation effrénée des grandes métropoles, peinant à suivre la cadence de l’industrialisation puis de la tertiarisation galopante mais subissant de plein fouet les conséquences désastreuses des bulles spéculatives qui en découlent. Chaque génération adopte son point de vue propre sur la vie, le travail et l’héritage, Man’yô se conformant avec sérieux à son rôle d’épouse de la branche aînée, Kemari embrassant la contre-culture violente et vindicative des loubards avant de devenir mangaka renommée et d’assumer son rôle d’héritière Akakuchiba, et Tôko profitant de l’affluence familiale pour assumer son refus de la société de production et de consommation.

Si j’ai préféré les deux premières parties du récit, j’ai quand même apprécié de pouvoir en apprendre plus sur l’histoire économique et sociale récente du Japon, un pays que je connais finalement assez peu. On s’attache facilement aux personnages de la famille Akakuchiba, et à tous ceux qui gravitent autour d’eux, et le style d’écriture assez familier nous donne l’impression d’être en train de siroter un thé bukupuku avec Tôko alors qu’elle nous raconte, avec force d’interjections, l’histoire si particulière de sa famille des Rouges d’en haut.


Résumé de l’éditeur:

« Man’yô avait beau avoir été ramassée et élevée par cette femme des villages, bonne et douce, la femme des montagnes qu’elle était ne lui ressemblerait jamais. »

À l’été 1953, la petite Man’yô est recueillie par un couple d’ouvriers du village de Benimidori. Rien ne la prédestine à intégrer, quelques années plus tard, l’illustre clan Akakuchiba qui a fait fortune dans la sidérurgie. Lorsque la crise industrielle frappe le Japon, la famille est menacée. Sa survie dépend désormais de la fille rebelle de Man’yô. Mais celle-ci, à la tête d’un gang de motardes, a d’autres soucis que de perpétuer l’héritage familial…
À travers le destin de trois femmes, La légende des filles rouges dresse un portrait captivant des évolutions de la société japonaise jusqu’à nos jours.


Sans réelle ambition, sans non plus le désir débordant de dépenser un argent fou pour quoi que ce soit, ni vraiment d’intérêt pour m’amuser dans les grandes largueurs. Je n’étais pas davantage prête à m’investir dans une carrière pour devenir quelqu’un dans une entreprise au point d’y perdre mon identité. Je n’avais aucune envie d’acquiescer ou de courber la tête pour des choses auxquelles je ne croyais pas. Ce qui ne m’empêchait pas de sentir, comment dire… la suffocation de ces journées qui m’entraînaient vers l’âge adulte. Je souffrais de penser que j’aurais dû m’appeler « Liberté ». J’avais de quoi manger sans problème, je n’avais rien à faire, mais étais-je libre ? C’était quoi la liberté, pour nous ? La liberté, pour une femme, qu’est-ce que c’est ?

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