La blessure Jean-Baptiste Naudet L'Iconoclaste 2018 68 premières fois The Unamed Bookshelf

📖68 Premières Fois – Automne 2018

En se faisant reporter de la guerre d’Algérie plusieurs décennies après les faits, Jean-Baptiste Naudet nous replonge dans l’atrocité de cette guerre d’usure où torture et massacre sont les maîtres mots. Ajoutées à ces descriptions vivaces, les lettres échangées par Danielle et son fiancé, Robert, ne font que renforcer le sentiment d’injustice, de gâchis et d’inutilité de cette guerre contre les « fellouzes ». Dans ces lettres pleines d’innocence et d’espoir, les deux fiancés envisagent la fin de la guerre, prévoient leur vie au retour de Robert, alors même que celui-ci a bien conscience qu’il est probable qu’il n’en revienne pas. Un amour rendu impossible à cause d’un gouvernement français incapable d’assumer ses torts et de mettre un terme à cette guerre coloniale perdue depuis longtemps – le fardeau d’une génération traînée de guerre en guerre, d’Indochine en Algérie, pour  la seule fierté d’un Etat français en mal d’empire.

Jean-Baptiste Naudet nous livre sans ambages ses traumatismes de jeune homme, face à une mère dévastée par un passé impardonnable et puis ceux, plus récents, nés de la culpabilité d’avoir condamné ou compromis tant de gens pendant ses reportages à haut risque. Il nous laisse entrevoir la réalité du métier de reporter de guerre, l’attractivité addictive du danger et la fatigue morale des situations impossibles. Il ne nous cache rien des difficultés rencontrées sur son chemin : la dépression violente et expansive de sa mère, sa propre descente aux enfers et ses épisodes d’internement pour tenter de lutter contre son syndrome post-traumatique. C’est un récit extrêmement personnel, un exorcisme de ce que l’auteur a vécu, une quête de sens pour retrouver l’origine de cette vocation inhabituelle, mais c’est aussi un récit à vocation universelle : un message de paix à destination des générations futures pour que jamais ne soient reproduites les atrocités de la guerre d’Algérie.

Mention particulière à Gilles Naudet, sans qui ce livre n’existerait pas, et qui synthétise brillamment son message dans les dernières pages – merci, vous m’avez émue aux larmes.


Résumé de l’éditeur:

1960. Il a tout juste vingt ans. Alors qu’il patrouille dans le djebel algérien, le sergent Robert Sipière est tué d’une seule balle. A Paris, Danièle, sa fiancée, est dévastée. Toute sa vie, elle gardera sur son cœur les lettres d’Algérie. Et sombrera dans la folie.
Des années plus tard, son fils, Jean-Baptiste, devient reporter de guerre. Pourquoi affronte-t-il lui aussi l’horreur des conflits  ? A tant fixer la mort, la folie le guette à son tour. Jusqu’au jour où il découvre la correspondance entre sa mère et un jeune sergent mobilisé en Algérie, son premier fiancé. Il commence à comprendre qu’il est prisonnier d’un destin qui n’est pas le sien.
De ces trois vies sacrifiées, Jean-Baptiste Naudet tresse une même blessure. Et livre un grand récit sur la guerre, la filiation, l’amour.


La guerre, ce n’est pas seulement la « drogue du combat », cette addiction aux sensations fortes, cette soif d’action qui l’emporte sur la peur, ce concours idiot de machisme. C’est surtout une irremplaçable intensité des rapports humains, portés à leur incandescence. Dans la vie ordinaire, vous pouvez passez votre existence entière avec quelqu’un sans savoir ce qu’il vaut vraiment. Dans la guerre, quand vous rencontrez quelqu’un, vous le savez très vite. Vous comprenez immédiatement s’il peut vous tuer, se sauver en cas de danger ou bien sacrifier sa vie pour vous. La guerre, c’est la vérité de l’homme mise à nu, dans toute son horreur, sa bassesse, toute sa grandeur, sa beauté.

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