Les Embrouillaminis Pierre Raufast Aux forges de vulcain The Unamed Bookshelf

Qui n’a jamais rêvé de pouvoir revenir en arrière et prendre une décision différente à un ou plusieurs moments afin de changer sa vie et son destin ? Comme beaucoup, j’étais fascinée dans mon enfance par ces « livres dont vous êtes le héros », permettant au lecteur de décider de la trajectoire du récit au fil des pages. Dans ses Embrouillaminis, Pierre Raufast s’approprie ce principe en l’appliquant à un style littéraire autrement plus exigeant. Lorenzo choisira-t-il les études en école de commerce ou d’ingénieur ? Partira-t-il au Mexique ou fera-t-il une mission humanitaire en France ? Prendra-t-il de la confiture de fraise ou préférera-t-il celle à la figue ?

Ouvrant le champ des possibles, Pierre Raufast nous propose une multiplicité de destins, qu’il met à notre portée en nous laissant choisir, à la fin de chaque chapitre, une option ou une autre. Réflexion sur la vie autant qu’exercice littéraire de haute volée, ce livre est définitivement une exception dans le paysage littéraire, une curiosité étonnante qui vaut le détour – et un sacré détour ! Utilisant les jeux vidéos comme métaphore, avec cette possibilité magique de reprendre une partie du début ou de choisir de repartir de la dernière sauvegarde, l’auteur questionne l’influence réelle que nous avons sur notre propre destin : est-ce que, si nos choix avaient été drastiquement différents, notre vie aurait pris un chemin complètement éloigné de celui sur lequel nous sommes aujourd’hui ? Lorenzo a beau pouvoir choisir entre plusieurs destins, bizarrement nombre d’entre eux le mènent toujours au même endroit…

Au risque de m’attirer les foudres de ceux qui ont adoré, je dois avouer que, même si je ne peux que saluer la maîtrise de l’auteur dans la conception de ce récit unique, je n’ai pas accroché à la construction du livre. Je me rends compte, à mon grand étonnement, que j’aime me laisser porter par une histoire, j’aime qu’elle ait un début, une fin et des péripéties entre les deux. Je me suis retrouvée ici à relire plusieurs fois chaque chapitre, parce que j’oubliais, d’un moment de lecture à l’autre, les spécificités de chaque chemin emprunté par Lorenzo. J’ai lu certaines trajectoires dans le désordre, trop habituée à tourner les pages pour suivre le récit de manière linéaire, et je n’ai toujours pas trouvé comment on arrive au chapitre 58, malgré une étude approfondie des différents destins, menée post-its à la main. Impossible de vous donner un avis tranché, j’ai apprécié les histoires et les anecdotes, goûté comme toujours l’imagination débordante de l’auteur et son humour décalé, mais cette structure littéraire n’est pas celle qui m’a le plus convaincue – rendez-vous ici, ici, ici, ici et ici pour en découvrir d’autres.


Résumé de l’éditeur:

L’auteur de ce roman est né sous le signe de la Balance : il est incapable de choisir sa confiture au petit-déjeuner ni même le destin des héros de ses romans.

Est-ce que Lorenzo part au Mexique rejoindre une équipe d’effaroucheurs, disciples des dieux aztèques ? Ou alors, est-ce que Lorenzo reste dans la vallée de Chantebrie et devient cambrioleur par amour ?

José-Luis Borges parle d’une bibliothèque infinie dans laquelle se trouveraient toutes les histoires du monde. L’auteur de ce roman remercie l’écrivain argentin pour l’avoir invité dans ce lieu où l’indécision est heureuse.


J’entendais ma mère décrire ainsi nos destinées : « Je suis née, je me suis mariée avec ton père, tu es né. Tu te marieras, tu auras un enfant, un jour je mourrai, puis viendra ton tour. » Deux existences condensées en moins de trente mots. Certes, les trous restent à combler mais, au fond, quelle importance, mon chéri ? Le principal est dit. Voici l’extrait sec. Triste synopsis minimaliste d’une vie qui gomme les rencontres annexes, les petites réussites sans lendemain, les voies sans issue, les infimes détails, les aléas sans conséquence. L’inquiétude du printemps 1986, cette bouteille qui réconcilia deux amis, la tuile envolée par cette nuit de fort mistral : tout ce qui fait le sel de nos petites vies. Seules les âmes fortes peuvent être ainsi comptables de leur vie.

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